Cette facture m’interpelle ! M. LEYMARIE est artisans maçon en même temps qu’il possède l’hôtel du Nord. Ici tout est normal.
Qu’il fasse des travaux au moulin de Biard c’est encore normal mais la facture est au compte de M. MERCIER. Est-il propriétaire du moulin ? mais surtout c’est pour payer la dégradation de la chapelle de Nexon !
Je suppose qu’il s’agit de la chapelle des Garennes. La dégradation est-elle du fait de M. MERCIER ou est-il un généreux donateur?
Les témoins de cette époque ne sont plus très nombreux mais peut-être que quelqu’un sait ce qui c’est passé.
Merci pour les réponses que vous pourrez me fournir afin d’enrichir « la petite histoire de Nexon ».
Léonard Henry MATHIEU est né le 12 décembre 1898 à Meilhac. Son père, Pierre MATHIEU (1866 – 1935) y était agriculteur.
Léonard avait un frère ainé, Sylvain Pierre (1894-1971), plus âgé de 4 ans. Sylvain a été mobilisé pendant toute la Première Guerre Mondiale. Pour l’époque il était grand, 1m80, et a été appelé au 5ème régiment de cuirassiers basé à Tours.
Léonard a été incorporé au 34e régiment d’artillerie de campagne qui stationnait à Périgueux au moment de la mobilisation et qu’il rejoint le 3 mai 1917 sur la zone armée. Il passe ensuite au 33e régiment d’artillerie et il est blessé à la cuisse droite le 23 aout 1918 à Epagny (Aisne) par un éclat d’obus. Après plusieurs affectations il est renvoyé dans ses foyers le 23 mars 1921.
Revenu à la vie civile il ne goute sans doute pas aux plaisirs de l’agriculture. Il s’endette pour acheter l’harnachement qui va lui permettre d’entrer dans la gendarmerie à cheval. Nommé gendarme à cheval le 27 février 1924 il arrive à l’école de gendarmerie de Toul le 1er avril 1924. A la sortie, le 9 juillet 1924 il est affecté à la 3e Légion de gendarmerie. Mais les missions auxquelles il participe ne lui plaisent pas, en particulier la répression des mouvements ouvriers. Il présente sa démission qui est acceptée le 22 octobre 1924. Il sera resté moins de 8 mois sous l’uniforme bleu des gendarmes. Il regagne Meilhac ou il va reprendre le métier d’agriculteur.
Le 13 juin 1925, à Nexon, il épouse Laure JOUHAUD. De ce mariage naitra une fille, Georgette MATHIEU. Elle épousera Jean BLOND, boucher à Flavignac et ils auront un fils, Alain Blond qui sera médecin à Saint Laurent sur Gorre et maire de cette commune de juin 1995 à mars 2020.
C’est sans doute en fréquentant sa future femme qu’il a rencontré les joueurs de l’équipe de rugby de Nexon et qu’il s’est mis a jouer avec eux.
Après son mariage, Léonard habite à Nexon dans le village de Valeix où il exploite sans doute la ferme de ses beaux-parents. Il décède le 7 juillet 1935, dans sa 37ème année. Il aurait reçu un mauvais coup au ventre lors d’un match et il se plaignait d’avoir toujours mal sur un coté. Il serait mort dans de grandes souffrances après une tentative d’opération.
Merci à Christian MAZABRAUD, son cousin, et à son épouse Mireille pour le formidable travail généalogique qu’ils réalisent.
Je suis toujours à la recherche de documents sur les joueurs de rugby de Nexon de 1920 à 1940.
Maurice JOUHAUD (1905-1983), marchand de vin à Nexon, propriétaire rue Victor Hugo et rue Saint Ferréol possédait une pierre en granit en forme d’écusson sur laquelle étaient sculptées les armes de Nexon.
Ce blason se lit ainsi : D’azur à trois tours d’argent maçonnées de sable, accompagnées de six fleurs de lis d’or, 3, 2 et 1. C’est le blason des LASTOURS que Nexon a repris.
Cette pierre, provenant d’un ancien château, fut trouvée par les parents JOUHAUD en creusant les fondations de l’immeuble rue St Ferréol.
En 1960, Maurice JOUHAUD en a fait don à la commune. Celle ci la fit restaurer par un tailleur de pierre des carrières DUGENY à Saint Hilaire les Places.
La commune installa la pierre-blason dans la salle du conseil de l’ancienne mairie. Elle resta à l’Agora quand la mairie fut transférée dans le château.
Avec la transformation de l’Agora en Maison de l’Intercommunalité la pierre-blason a été scellée sur la façade, à droite de l’escalier. Elle est maintenant visible de toutes et de tous.
Avant de laisser à Camille Garaud le soin de raconter ses souvenirs de guerre et de prisonnier, quelques mots sur sa vie.
Son père Jean GARAUD, né de père inconnu, était agriculteur avec sa femme Marie IMBERT à Bersac sur Rivalier. Il l’a épousée le 14 mars 1904 à Bersac, une fois terminé son service militaire effectué au 50e RI de novembre 1900 à septembre 1903. Après son mariage Jean GARAUD est parti à Paris où il a été domestique.
Comme tous ceux de sa génération, il a été mobilisé dès la déclaration de la guerre, le 1er aout 1914. Il ne sera démobilisé que le 31 janvier 1919. Il a été cité à l’ordre de son régiment avec une appréciation élogieuse « Très bon soldat courageux et dévoué. Au front depuis le début de la campagne a servi de modèle d’endurance à ses camarades plus jeunes ». Son bon comportement lui a valu l’amnistie de deux condamnations qu’il avait eu, en janvier 1896 pour outrage public à la pudeur et en février 1909 pour infraction à la police des chemins de fer. Son fils Camille a hérité à la fois du fort caractère de son père et de son courage, ce qui lui permettra, à lui aussi, de connaitre la guerre et de passer près de 8 ans loin de chez lui.
Jean GARAUD est à peine revenu de la guerre que, le 13 mars 1919, nait son dernier fils Camille, à Nouailles, village de la commune de Bersac sur Rivalier.
Acte de naissance de Camille GARAUD – Archives départementales de la Haute-Vienne
A Bersac Camille vit la difficile existence d’un fils de métayer, mal payé pour un travail difficile. A la mort de son père en 1929, il s’installe à Verneuil sur Vienne. Il s’y marie le 14 septembre 1937 avec Marie FAUCHER alors qu’il n’a que 18 ans, ce qui n’était pas commun à cette époque.
Sur les conseils d’un ami adjudant il effectue une préparation militaire.
Brevet de préparation élémentaire au service militaire de Camille GARAUD
Titulaire du brevet de préparation élémentaire au service militaire le 20 juin 1938, Camille GARAUD devance aussitôt l’appel. Il est affecté au 20ème régiment de dragons à Limoges au service des transmissions.
Le peloton des transmissions. Camille GARAUD, 3ème rangée, 4èmme a partir de la gauche, souligné en jaune.
Dès le 20 aout 1939 le régiment est mis sur pied de guerre et le 23 août il se transforme en 23e Groupe de Reconnaissance de Corps d’Armée (GRCA), le 23e GRCA, et en cinq Groupes de Reconnaissances de Division d’Infanterie: les 2e, 18e, 21e, 27e et 93e GRDI..
Les officiers du 20e dragon en 1939 avec le lieutenant-colonel PREVOST au centre du 1er rang.
Camille GARAUD est affecté au 93e GRDI.
Pièce d’identité de Camille GARAUD appartenant au 93e GRDI, signée par le capitaine JUMEL le 17.11.39.
Il est à l’Etat-major, au peloton TSF. Il part pour les Ardennes en train le 1er septembre. L’embarquement a lieu de 7h30 à 12 heures. Les hommes sont installés sur des plateformes, les chevaux dans des wagons couverts. Le départ s’effectue à 12h30 pour Argenton sur Creuse. A 14 heurs les soldats apprennent la mobilisation générale. Le voyage se poursuit par Châteauroux, Orléans, Troyes, Saint Dizier, Verdun et Salmory ou le convoi arrive le 2 aout à minuit. Ensuite transport jusqu’à Carignan qui est atteint le 3 à 8 heures. Après une semaine passée sur place, c’est le départ pour une marche de plus de 200 km vers le front, par étapes d’environ 50 kms. Le 17 septembre arrivée à Klang (Moselle), à quelques kilomètres du front.
Carignan – Klang
Après 15 jours à Klang, la marche vers le front se poursuit jusqu’à Forgeville, face à la ligne Maginot puis c’est le retour vers l’Ouest en passant par Gorze et Appremont la foret avant d’arriver aux Alleux* (Ardennes) le 16 octobre 1939. Le groupe va y rester 3 mois.
*Le 1er janvier 2016, Les Alleux a fusionné avec Le Chesne et Louvergny pour pour créer la commune nouvelle de Bairon et ses Environs.
Il ne fait pas grand chose sinon de creuser quelques tranchées, apprendre a envoyer des messages optiques ou en Morse. Le 15 janvier 1940 le groupe reprend la direction de Carignan qu’il dépasse et s’installe à Pouru-Saint Remy du 17 janvier au 19 mars. A cette date, mouvement vers la frontière belge jusqu’à Tremblois où le GRDI reste jusqu’au 14 avril, puis Mogues jusqu’au 10 mai et le 10 mai 1940 franchissement de la frontière belge jusqu’à Pin. C’est là que l’unité subi son baptême du feu aérien, alors qu’ elle est en train de monter une ligne téléphonique.
Une page du carnet de Camille GARAUD : du 18.8.39 au 14.4.40
Le lendemain de cette attaque aérienne c’est le recul par la même route jusqu’à Appremont et Belleville sur Bar où le groupe s’arrête du 16 au 22 mai. Puis il reprend sa marche dont on n’arrive pas à saisir la logique : Brieulles sur Bar, Bréhéville, Dombras, Drosnay, Brienne le château le 14 juin au soir, Vendeuvre sur Barse le 17 juin et le 17 juin toute l’Unité est capturée. C’est la fin de la liberté et le début d’une vie de prisonnier.
La suite est racontée par Camille GARAUD telle qu’elle a été enregistrée par le personnel de la maison de retraite de Nexon à la fin de l’année 2011.
Souvenirs d’un prisonnier de guerre
J’ai été fait prisonnier près de Dijon le 17 juin 1940, avec toute mon unité. Les Allemands nous ont rassemblés à Avallon dans l’Yonne. Nous y sommes allés à pied. Nous sommes restés 8 jours dans un pré dans la boue, et sans manger. Déjà, les conventions internationales n’étaient pas respectées. Ensuite nous avons été transférés à Saint-Florentin (Yonne). Là les Allemands nous firent travailler au nettoyage des routes qui étaient encombrées par des épaves de camions, voitures, et chars notamment. Nous tirions ce matériel avec des câbles, le but étant de permettre la libre circulation des unités allemandes. Impossible de s’y soustraire.
Ce travail terminé, nous avons marché pendant huit jours pour rejoindre Laon, où nous étions logés à la citadelle.
C’était le moment de récolter les blés qui étaient murs et toujours sur pied puisque les fermiers avaient fui devant l’avancée des troupes allemandes. Nous avons donc moissonné. Mais en ce qui me concerne, l’officier qui commandait nos gardiens avait su que j’appartenais à un régiment de dragons et qu’en principe je devais savoir monter à cheval. Il avait lui-même un cheval qu’il n’avait pas le temps de monter assez souvent. Il décida que non seulement je m’occuperai des quatre chevaux de son unité, mais aussi que je promènerai son cheval accompagné par un cavalier allemand. Il m’avait bien recommandé de ne pas tenter de m’évader si je voulais rester en vie. Or au cours de la première sortie, accompagné par l’ordonnance de l’officier, armé et avec ordre de tirer si je tentais de lui fausser compagnie, j’ai voulu tester le cheval. Il a suffi que je l’éperonne vigoureusement pour qu’il parte au galop et laisse l’ordonnance sur place, lequel ordonnance s’est mis à hurler et m’aurait tiré une balle dans le dos. J’ai donc calmé ma monture et nous sommes rentrés à la citadelle. Mais mon rôle de palefrenier n’a pas duré plus de quatre jours.
Nous avons ensuite quitté la citadelle de Laon pour nous rendre au camp de Sissonne dans l’Aisne où nous fûmes occupés au nettoyage du camp. Là encore la nourriture était maigre. J’avais décidé, avec un copain, de m’évader. D’autres avaient réussi, certains avaient été repris. Mais trois jours après, le 20 mai 1941, nous avons été transférés en Allemagne.
Premier camp en Allemagne
Nous passons par Bocholt, stalag 6 F où nous restons une semaine puis nous sommes envoyés à Dortmund au stalag 6 F*, camp de prisonniers de guerre pour homme de troupe et sous-officiers, ou il a été procédé à un tri par profession.
*Il n’y a plus de traces du Stalag VI D de Dortmund. Toutes les archives ont été détruites pendant les bombardements. Une stèle a été érigée à son emplacement.
Nous étions le 28 mai 1941 et je fus affecté au kommando 511. Tous les cultivateurs, dont j’étais, furent envoyés travailler en usine sidérurgique, la Fonderie Euch à Dortmund qui fabrique de plaques pour les blindés. Nous faisions les 3 x 8 heures.
Camille GARAUD au centre
C’était très pénible et dangereux. Nous n’avions aucune protection, sortir les plaques du four était très dur. Un jour un ouvrier civil m’a poussé pendant que je plaçais les plaques les unes sur les autres pour les faire refroidir. L’a-t-il fait exprès ou pas ? Je pense qu’il l’a fait exprès. Je suis tombé en avant sur mes deux mains. Si d’autres ouvriers civils ne m’avaient pas relevé, j’y restais et je brulais entièrement. Les paumes de mes mains ont été brulées et je ne pouvais plus rien faire, même pas manger. C’est un copain prisonnier qui me faisait manger.
Certains ouvriers allemands, probablement antinazis et pacifistes, aidaient au sabotage ; ils nous montraient comment faire éclater un cylindre de laminoir avec un balai. Il suffisait de laisser tomber le balai entre les rouleaux et le cylindre. Celui-ci, devenu malléable par la chaleur, se déformait, devenant inutilisable. Nous avions aussi des moyens de communication tels que le message roulé dans une cigarette.
Ma première évasion, 28 juin 1942.
Ce sont des ouvriers civils qui travaillaient dans l’usine qui m’ont procuré des vêtements civils, et de l’argent pour que je puisse me payer mon billet de train pour m’évader. Les Allemands qui n’étaient pas fascistes n’étaient pas dans l’armée, ils étaient considérés comme travailleurs de force, hors la loi. De plus, ils m’ont caché pendant une nuit ; à l’appel ils m’ont déclaré malade. Je m’étais évadé à 3h1/2.
Pour ne pas me faire remarquer, on m’avait conseillé de toujours faire le salut nazi lorsque je croiserai des gens. Pas de chance, dès ma première rencontre, j’ai oublié, ce qui eut pour effet de provoquer la colère de celui que je venais de croiser. Après ce petit incident, je n’ai plus oublié de saluer le bras levé « Heil Hitler ».
Il fallait même se méfier des enfants, enrôlés par le parti, qui avaient une tenue spéciale avec une petite croix gammée (jeunesses hitlériennes) ; ils pouvaient nous dénoncer et nous faire arrêter.
La croix gammée, je l’ai eue en passant sur un pont au bout duquel il y avait des gens qui faisaient une quête. J’ai pu les saluer et leur donner un mark. Ils m’ont épinglé une médaille et j’ai poursuivi mon chemin sans problème.
Plus loin, j’ai croisé un groupe de jeunes Hitlériens, que j’ai salués, j’avais la croix gammée sur mon vêtement, ils m’ont suivi jusqu’à un emplacement ou j’ai pris un sentier pour leur faire croire que je connaissais le coin, et là ils ne m’ont plus suivi.
Lors de cette 1ère évasion, j’ai marché à pied de Dortmund à Aix-la-Chapelle en Allemagne. Cela représente 3 jours de marche en s’arrêtant seulement la nuit. J ’ai passé la nuit sous un pont, et fait ma toilette avec l’eau de la rivière. Le deuxième jour, de Wuppertal au Rhin, j’étais fatigué, je me suis donc reposé dans un bois, mais j’ai dû m’enfuir devant un civil. Puis j’ai rencontré deux soldats allemands qui m’ont questionné mais m’ont laissé partir.
Il y a environ 150 km entre Dortmund et Aix-la Chapelle selon l’itinéraire.
Je savais que quand j’arriverais au bord du Rhin, il y aurait un passeur. Effectivement, il y avait une barque. Je m’y suis installé. Ce que j’ignorais, c’est que j’étais dans une barque qui servait à faire traverser les ouvriers d’une usine. Fort heureusement, il fallait que le passeur revienne chercher un ouvrier qui était resté sur l’autre rive. J’ai fait une traversée sans encombre et je suis allé dans un bosquet pour me reposer et y passer la nuit. Je ne savais pas que j’étais près d’une batterie de DCA (défense contre l’aviation). Pendant la nuit il y a eu une alerte et des tirs anti-aériens. Mauvaise nuit !!!
A l’aube du troisième jour, j’ai pu cependant, prendre la route d’Aix-la-Chapelle. Il faisait chaud, j’avais soif. A un moment, j’ai croisé un gendarme, que j’ai salué et qui ne m’a pas inquiété. Arrivé à Aix-la-Chapelle, j’ai à nouveau croisé ce gendarme, qui m’a reconnu et m’a demandé mes papiers. Je lui ai demandé pourquoi il m’arrêtait. « Je suis obligé de faire mon travail. Il y a trop de monde qui regarde et je ne peux pas vous laisser partir ». Les gendarmes m’ont apporté deux bières pour étancher ma soif. Donc la 3ème nuit, j’ai dormi à la gendarmerie. Nous étions le 1er juillet 1942
Le lendemain ils m’ont conduit à un camp de discipline des évadés à Bonn. On épluchait les pommes de terre. Il était interdit d’emporter les épluchures, mais quand on a faim comment y résister ? Un jour j’avais réussi à en garder, mais alors que je les faisais cuire dans une boite de conserve, la sentinelle qui faisait sa ronde m’a interpellé sèchement : « Was machen sie das ? Verboten » (que fais-tu là ? C’est interdit). Et sans attendre de réponse, il donne un grand coup de pied à mon repas.
De Bonn, retour à Dortmund pour travailler sur les voies de chemin de fer endommagées par les bombardements alliés. Nous étions logés dans un baraquement à côté de l’usine. Pour la deuxième fois, j’avais décidé de m’évader.
Ma seconde évasion, juin 1943.
Ma première évasion, je l’ai faite à pied, et pour la deuxième, en juin 43, j’ai pris le train de Dortmund. Des civils m’avaient à nouveau procuré des effets et de l’argent pour payer mon billet. Donc je suis sorti du baraquement, j’ai réussi à passer sous les barbelés et suis allé prendre le train. Mais à Trèves : alerte, l’aviation alliée menaçait. Ils ont fait descendre tous les voyageurs du train pour aller dans les abris souterrains. En ressortant des policiers contrôlaient l’identité de toutes les personnes. Sans papiers, j’ai été repris avec un officier français. En fait, les Allemands savaient que trois officiers s’étaient évadés et comme nous étions seulement deux, ils voulaient me faire dire que j’étais officier.
Nous avons été conduits dans une cellule de la prison de la ville et nous y sommes restés trois jours. Nous n’avions qu’une ration de nourriture par jour et le problème était que ce capitaine, du nom de CAPITAINE, ne partageait pas. C’était à celui qui pouvait s’emparer le premier de la gamelle.
Le 3ème jour un officier allemand est venu ouvrir la porte et m’a demandé ce que je faisais dans cette cellule. Je lui ai répondu que j’étais prisonnier de guerre évadé. J’ai été envoyé dans un camp de discipline de prisonniers, sur les hauteurs de Trèves. Là les Allemands ont remplacé nos vêtements civils par une tenue de Zouave : pantalon rouge, vareuse bleue et des claquettes comme chaussures. Pendant toute une semaine on a déchargé des wagons de charbon, sans se laver. On était noirs comme des Sénégalais.
Le travail terminé, nous avons enfin pu nous laver, et ils nous ont remis nos effets militaires. Avec un grand KG dans le dos. (« Krieg G », prisonnier de guerre). Une fois habillés, nous avons été embarqués vers le camp de Limberg (« Stalag XII A)*.
*Le Stalag XII-A était situé dans la campagne qui sépare la ville de Limburg an der Lahn du village de Diez.
Le voyage a duré 9 jours, sans manger ni boire ; nous étions dans un état déplorable, ne tenant plus debout, dans une puanteur atroce. Imaginez 45 personnes dans un wagon à bestiaux ou l’on met seulement 8 chevaux… Au lieu de paille sur le sol du wagon, nous avions de la poussière de charbon. Pour nous désaltérer, nous sucions les boulons sur lesquels il y avait un semblant d’humidité, mais nous étions tellement nombreux à vouloir le faire… La faim, c’est mauvais, mais la soif, c’est terrible ! c’est terrible !!
A la fin du voyage, nous étions plus de 45 dans notre wagon. Des prisonniers d’autres wagons avaient réussi à sortir par des trous pratiqués dans les planchers, avaient été repris par les sentinelles qui après avoir abattu froidement deux des évadés, avaient réparti les autres dans différents wagons, dont le nôtre.
Entrée du Stalag XII A avec des gardes.
Limberg était un camp pour les Russes et les Français. Des convois entiers de voitures a bras remplies de cadavres, dont certains bougeaient encore. Mais ça ne faisait rien, dans le trou « allez », c’était terrible ! Ils balançaient de la chaux sur les corps et ils empilaient de nouveaux cadavres. Nous sommes restés peut-être 3 semaines à attendre la mort.
Nous étions dans des bâtiments en bois et nous couchions sur des planches, dans des lits superposés de 3 ou 4 étages. Tous les matins, au réveil, ils nous faisaient faire de la marche au pas cadencé. Les « kapos » piquaient avec une baïonnette ceux qui ne se levaient pas assez vite. Les toilettes, c’étaient des tranchées avec des planches dessus et si on tombait dans le trou, on y restait. C’était fini, personne ne vous sortait.
Un jour, tous les prisonniers évadés ont été à nouveau embarqués dans des wagons à bestiaux. Mais avant de monter dans le train nous avons dû passer par l’infirmerie du camp pour être piqués soi-disant contre le typhus. J ’ai subi deux piqures, une dans chaque sein, et j’ai gardé deux croutes à ces endroits, l’une d’elles n’est tombée qu’à l’âge de 88 ans.
Il s’agit de la fiche médicale (gesundheitsblatt) de M. GARAUD . Il a été vacciné contre la variole et contre le typhus et il a été « épouillé » (entlausungen) le 20 mars 1943.
Encore une fois, destination inconnue, et toujours les mêmes conditions : 45 par wagon, ni à boire ni à manger, etc… Ce convoi était organisé de la manière suivante : l’avant et l’arrière du train étaient constitués de wagons de matériel, d’armement et d’hommes de troupe. Nous étions au milieu. En cas d’attaque aérienne, nous n’avions aucune chance de survie.
Transfert à Lvov.
Ce calvaire a duré plus d’une semaine avant d’arriver à Lvov en Pologne, aujourd’hui devenu Lviv en Ukraine. Beaucoup étaient morts durant le voyage et ceux qui étaient trop fatigués et chancelants furent exécutés d’une balle dans la tête.
Nous avons quitté la gare pour nous rendre à la citadelle à l’intérieur de laquelle se trouvait le camp.
La citadelle de Lvov-Lviv; L’appel des prisonniers
On nous occupait à l’extérieur à différentes taches . La vie était dure, c’est là que j’ai connu des températures de – 41°. Le soir, de retour à la citadelle, il fallait des volontaires pour les corvées ; un jour, j’ai voulu me porter volontaire, mais un camarade m’en a dissuadé en me retenant par la manche de mon vêtement. J’ai compris, après, que ces volontaires ne revenaient jamais. Il était aisé pour les gardiens de dire que les volontaires avaient cherché à s’évader ! Mais le front russe avançait, et les Nazis ont commencé à appliquer la convention de Genève. Les « corvées » sans retour ont cessé.
Puis nous sommes allés travailler dans un garage où nous réparions les camions qui revenaient du front de Russie. Nous y installions également des attelages pour leur permettre de tracter d’autres véhicules. Nous sabotions bien évidemment le travail. Avec des lames de ressort nous fabriquions des poignards qu’une fille polonaise sortait de l’atelier.
Le retour vers les camps en Allemagne en passant par Cracovie.
Au fur et à mesure de l’avancée des Russes, on nous a déplacés vers Cracovie et Brunswick en Pologne, puis Hanovre en Allemagne.
A Cracovie, nous étions logés sur un terrain militaire construit par les Russes. Plusieurs de mes camarades d’infortune travaillaient dans le garage du camp (réparation de véhicules endommagés sur le front russe). Les chauffeurs de ces véhicules demandaient aux mécanos prisonniers de travailler « langsam », lentement, n’étant pas pressés de retourner sur le front russe, tellement les conditions y étaient horribles. Ils expliquaient, entre autres, que les attaques aériennes incessantes des Russes les obligeaient à se camoufler pendant des heures dans la neige, hors de leur cantonnement ; beaucoup mouraient de froid ou avaient des membres gelés.
Un jour, nos gardiens nous ont emmenés dans un baraquement pour prendre une douche. Après nous avoir fait retirer nos alliances et entièrement déshabiller, ils nous ont fait entrer dans une immense pièce. Nous avions entendu parler de ces chambres à gaz qui ressemblaient à des douches, mais ils ont ouvert les robinets et nous avons reçu une eau glacée. Ensuite, nos vêtements nous ont été restitués, mais ces derniers avaient été passés au désinfectant et surtout à l’étuve, ce qui les avait fait rétrécir.
L’hiver 43-44 a été particulièrement rude, il a neigé d’octobre à mai. Nos conditions d’hébergement, d’habillement et surtout de nourriture étaient catastrophiques. Nous avons découvert en mai que nous avions vécu à côté d’un champ de choux cachés par la neige !
Pour ma part, j’ai travaillé en tant que peintre vitrier, et j’avais de bons contacts avec des civils polonais qui nous faisaient passer de la vodka. Je suis resté une partie de l’hiver à remplacer des carreaux, tant qu’il y en avait. Un soldat allemand cherchait un peintre en bâtiment et il m’a emmené avec lui pour peintre des jouets pour les enfants à Noel. La seconde partie de l’hiver, j’ai travaillé dans une usine située juste en face du ghetto de Cracovie (dans lequel d’après un soldat allemand, vivaient 60 O00 juifs) ; ce dernier était entouré d’une double rangée de barbelés et d’une clôture électrifiée. Un jour, on nous fait visiter une partie de ce ghetto où la population avait été anéantie. Tous les jours nous entendions avec angoisse de nombreuses rafales d’armes automatiques.
Au printemps 1944, du fait de l’avancée des Russes nous avons été déplacés et emmenés à Brunswick en Allemagne (en train et à pied). On a continué à faire les vitriers car toutes les nuits les Anglais venaient bombarder. Les dimanches les gardiens nous emmenaient jouer au foot ; il fallait traverser la ville au pas cadencé et en chantant pour aller au terrain de sport. Pensant que les Allemands ne comprendraient pas, nous chantions « dans le cul ils auront la victoire, ils sont foutus. » Les passants nous applaudissaient. Mais un officier allemand qui nous regardait passer et comprenait le français nous a fait faire demi-tour et nous n’avons plus joué au foot.
On était mieux qu’en Ukraine, et un peu mieux nourris. Un jour, à la sortie d’un abri après une alerte aérienne, j’ai aidé une Allemande à porter sa valise. Elle avait un petit chien auquel j’ai donné un morceau de sucre. Cela lui a fait tellement plaisir que tous les jours elle déposait un petit casse-croute à un endroit précis de mon lieu de travail. Elle s’appelait Margaret et nous nous sommes rencontrés plusieurs fois. Mon patron, M. FUSTER, qui avait été prisonnier en France pendant la première guerre mondiale (et qui n’en avait pas de trop mauvais souvenirs), m’a mis en garde car cette femme était la compagne d’un chef nazi de la ville.
Quand il n’y a plus eu de carreaux à poser à Brunswick, on a posé des planches en guise de carreaux. La pénurie de vitres a fait que nous avons été transférés à Munich.
Laissez-passer de Munchen (Munich) du 15.11.44 pour Camille GARAUD
à Munich aussi il y avait beaucoup de travail pour les vitriers. Un jour, les baies vitrées du grand théâtre ont eu besoin d’être changées. Il aurait fallu installer un échafaudage mais les allemands ne se préoccupaient pas de la vie ou de la mort des prisonniers. Il fallait passer sur un rebord étroit du toit, et nous portions notre carreau du côté de la rue. J’ai dit à mon copain : « à trois on va lâcher le carreau ». Les civils en bas se sauvaient de tous les côtés. Le travail de vitrier a été fini pour nous ! Nous avons été traités de saboteurs.
Un civil est venu au camp chercher un ouvrier, pour travailler chez un primeur qui avait 2 magasins en ville. Je le surnommais « Monsieur Carotte ». Il était gentil. Il m’a prêté des habits civils pour que je puisse me promener en ville. Une fois, un adjudant-chef m’aperçoit en promenade. Monsieur Carotte a témoigné que j’étais resté avec lui toute la journée pour travailler. Il me permettait, au grenier, d’écouter la radio. C’est là que j’ai appris le massacre d’Oradour sur Glane. En cas de danger, Monsieur Carotte coupait le courant.
La libération par les américains.
Les Américains nous ont libérés le 18 mai 1945. Mes camarades de détention sont restés consignés dans un baraquement pendant un mois, mais moi je suis resté chez mon patron. Avant le retour en France, nous avons été rassemblés à Dachau ; il n’y avait plus rien, tout avait été évacué, seule la prison était occupée par les anciens « kapos ».
Nous devions rentrer par la Suisse mais notre passage a été refusé, et nous sommes finalement revenus par Strasbourg et Paris, et enfin Limoges. rapatrié officiellement le 27 mai, je fus démobilisé le 2 juin 1945.
A Verneuil sur Vienne, j’ai fait la connaissance de ma seconde fille, qui était née le 8 mai 1940. Elle avait donc cinq ans. Pendant ces cinq ans, mon épouse et moi, nous avions rarement eu des nouvelles l’un de l’autre.
Devenu rapatrié, ancien prisonnier de guerre, il a fallu effectuer les démarches pour obtenir les indemnités qui m’étaient dues, percevoir les cartes d’alimentations et reprendre une activité.
Quand on regarde les sommes qui ont été versées aux prisonniers au titre des droits de solde acquis pendant la captivité on ne peut qu’être surpris par leur faible niveau. Pendant sa détention M. GARAUD a acquis 3234 francs, auxquels ont été ajoutés des droits ouverts après le départ des camps, ceux acquis avant la capture et une prime de démobilisation de 1000 francs soit au total 5 178 francs. Convertis en euros de 2021 cela ferait 298€ ! En 1947 le salaire mensuel pour 48 heures de travail hebdomadaire était de 7 000 francs, 5 ans d’une vie pour moins d’un mois de salaire, sans parler de ceux qui ont perdu la vie…
Camille GARAUD à Nexon
Après avoir passé le concours de facteur, Camille GARAUD est nommé à Nexon le 21 janvier 1949. Il prendra sa retraite en 1974. dévoué et consciencieux il était très apprécié de ceux à qui il amenait le courrier. A son époque le facteur ne le déposait pas dans une boite située à l’entré de la propriété, il entrait dans les maisons, en connaissait tous les gens. Non seulement il distribuait le courrier mais il apportait les mandats. Il faisait sa tournée avec une certaine somme d’argent et on n’a pas entendu dire qu’à Nexon, un facteur ait été dévalisé! Le facteur était un homme de relation, il établissait un lien entre tous ses « clients », il rendait des services, donnait des nouvelles…
Camille GARAUD n’a jamais oublié les prisonniers. Il a adhéré à l’association des Anciens Prisonniers de Guerre dont il a été secrétaire puis président. A cette occasion il a participé a de nombreuses cérémonies au monument aux morts.
A la fin de sa vie Camille GARAUD est entré en maison de retraite à Nexon. Il y a été honoré lors d’une cérémonie en janvier 2016 au cours de laquelle il a reçu la Médaille du Mérite Fédéral.
M. GARRAUD, le maire de Nexon, le directeur de l’EHPAD , le personnel et sa fille . Le Populaire 30 janvier 2016
Monsieur GARAUD est mort le 13 novembre 2016, il avait 97 ans dont 67 passés à Nexon.
Merci à Madame Lucette PAULY, fille de Camille GARAUD, pour son accueil et pour le prêt des documents qui m’ont permis d’illustrer cet article.
Au n° 11, c’était la « maison Limousin » en 1900. Elle est devenue « la maison LASPERAS » dans les années 1940-1960. Aujourd’hui elle ne porte plus le nom d’un artisan qui y exercerait son art, elle est devenue résidence particulière.
La maison a pris le nom de « maison LIMOUSIN » après le mariage d’un LIMOUSIN et d’une GIZARDIN. Cette famille originaire de Rilhac-Lastours est présente à Nexon depuis Pierre GIZARDIN (1670-1720) qui était à la fois chirurgien, apothicaire et notaire à Nexon. Son fils, Mathurin GIZARDIN (1692-1762) et son petit-fils Nicolas GIZRDIN (1742-1806) furent tous les deux notaires à Nexon. Parmi leurs descendants plusieurs furent aubergistes à Nexon.
En 1896, Raymond LIMOUSIN (1842-1922) habite avec sa famille dans la maison de la place de l’église. Le 28 octobre 1867 il avait épousé Marie-Antoinette GIZARDIN (1846-1916), la fille de Léonard GIZARDIN (1876-1867). Au moment du recensement Raymond LIMOUSIN est fabricant de vinaigre, mais aussi épicier, mercier et quincailler. Il a été admis au Cercle de la Concorde en 1886 et dès son admission il en est élu secrétaire en remplacement de Fernand GIZARDIN qui a démissionné.
Recensement de 1896 (archives départementales de la Haute-Vienne)
La famille LIMOUZIN vit avec ses 3 derniers enfants, Gabriel (1883-1960), Léonce (1885-1966) et Raymond (1892-1956). Le beau-frère, Léonce GIZARDIN, vit avec eux ainsi que 2 domestiques dont l’un a 70 ans et l’autre 14ans.
Raymond LIMOUSIN et son épouse Marie Antoinette ont eu 12 enfants dont 4 ont vécus quelques jours ou quelques mois. Une photo réuni Raymond Limousin et son épouse au centre entourés de leurs 8 enfants ayant vécu, accompagnés de leur conjoint.
La famille de R. et M. A. LIMOUSIN – Photo communiqué par un des arrières petit-fils, Jean Pierre LIMOUSIN
Les enfants sont disposés par ordre de naissance, de gauche à droite et de haut en bas. En haut à gauche, Marie (1868-1929) et son époux Armand NANEIX, à droite Henri LIMOUSIN (1872-1955) et son épouse Berthe BOULANGER. Sur la 2ème rangée, Léon LIMOUSIN (1874-1948) et son épouse Marthe BOURDICHON-LAFARGE puis Jeanne LIMOUSIN ( 1877-1955 et son mari Louis BOURDICHON-LAFARGE. Au 3ème rang, Aimé LIMOUSIN (1878-1952) et son épouse Valentine JEANNOT puis Gabriel LIMOUSIN (1883-1960) et son épouse Berthe NAUDASCHER. Enfin, Léonce LIMOUSIN (1885-1966) et son épouse Hélène GUERIN puis Raymond LIMOUSIN (1892-1956) et son épouse Suzanne NOTTIN.
Raymond LIMOUSIN aime être entouré de ses enfants comme ici avec les parents sur la terrasse et les enfants sur les marches de l’escalier.
Raymond et marie Antoinette LIMOUZIN et leurs enfants vers 1900
L’enseigne sur le mur, en haut des marches, indique que c’est l’agence d’une compagnie d’assurance contre l’incendie.
Panonceau Assurances
En 1901, Léon (1874-1948), le 3ème des enfants, à rejoint la maison familiale. Agé de 27 ans, Léon est pharmacien. Il est venu passer quelques mois chez ses parents pour préparer son départ pour l’Indochine. Il restera à Tourane, aujourd’hui Da Nang, pendant 2 ans (1902-1904). Une fois rentré en France il revient chez ses parents et le 21 septembre 1904 il épouse Marthe BOURDICHON-LAFARGE. Ils partent ensuite à Poitiers ou ils restent quelques mois avant revenir dans la région et de s’installer à Solignac.
1901
1906
Gabriel LIMOUSIN qui avait commencé une carrière de comptable à Nexon n’est plus présent lors du recensement de 1906. le 10 mars 1902, il s’est engagé pour 4 ans au 26e bataillon de chasseurs à pied et il est affecté à Vincennes. Il ne termine pas les 4 ans de son contrat. En effet le 27 octobre 1904, son jeune frère Léonce s’est lui aussi engagé dans le même bataillon .
Libéré de son engagement, Gabriel LIMOUSIN choisi de s’expatrier. En 1906 il part pour rejoindre la Compagnie des chemins de fer de Kayes au Soudan.
Située sur le fleuve Sénégal, 500 kms à l’Ouest de Bamako, Kayes fut de 1892 à 1899 la capitale du Soudan français. Lorsque Gabriel LIMOUSIN y arrive le tronçon Kayes-Bamako a été inauguré 2 ans auparavant.
La ligne dakar-Niger
La gare de Kayes en 1906
Gabriel rentre en France au début de l’année 1930 et ouvre un cabinet d’assurances au Bugue en Dordogne. Son fils Antoine (1914-2000) a dû hériter du désir d’exotisme de son père puisqu’il est parti au Maroc puis en Indochine où il s’est marié. Son fils Jean Pierre LIMOUSIN, moins globe-trotter mais héritier du gout des assurances, a ouvert un cabinet à Limoges où il a présidé la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Haute-Vienne, le Conseil économique social et environnemental régional (CESER) du Limousin puis le CESER de la grande région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes devenue Nouvelle Aquitaine. Ainsi, au-delà de notre amitié, nous avons des racines nexonnaises communes.
En 1911, Raymond et son épouse n’ont plus leurs enfants avec eux. Gabriel est en Afrique, Léonce après la fin de son engagement militaire deviendra représentant de commerce. Rappelé au service militaire en 1914 il effectuera une brillante campagne au cours de laquelle il sera blessé 2 fois. Promu lieutenant en 1917 il est décoré de la Légion d’Honneur en 1918. Raymond, le dernier, sera assureur et comme ses frères il s’engera en 1913 et fera une campagne en 1914-1918 qui lui vaudra d’etre décoré de la croix de guerre.
Recensement de 1911
Marie Antoinette décèdera le 8 septembre 1916 à 70 ans. Sa tombe est dans le cimetière de Nexon ainsi que celle de son père, Léonard GIZARDIN (1816-1867).
Après la guerre Raymond LIMOUSIN est veuf et tous ses enfants ont quitté Nexon. Au recensement de1921il est seul dans la maison. Il en loue une partie aux LAVAUD dont l’ époux, Louis, est tonnelier et l’épouse Léonie tient l’auberge, sans doute avec leur fille Marie âgées de 21 ans.
Recensement de 1921
Au recensement de 1926 un garage ouvre au rez de chaussée de l’immeuble. Il est tenu par Eugène BROUILLAUD. Les LAVAUD habitent maintenant rue du Centre, actuelle rue saint Ferréol. Monsieur est journalier, madame est aubergiste et leur fille qui a 26 ans est sans profession. Elles doivent tenir l’auberge sans habiter sur place. La maison est louée à la famille BROUSSEAUD.
Recensement de 1926
Avec le garage, la physionomie de cette partie de la place va changer. Des voitures vont stationner, une pompe à essence va être installée. Sur l’agrandissement de la carte postale ci-dessous, on voit les premières automobiles stationner et la pompe à essence actionnée à la main. A l’étage l’enseigne indique « Garage Moderne » mais l’auberge n’est pas mise en évidence. La boulangerie d’à côté est tenue par Jean MARTIN.
Le garage à la fin des années 1920
En 1931 la boulangerie MARTIN est recensée avec les habitations de la place de l’église. Monsieur BROUILLAUD a un ouvrier mécanicien logé et Madame BROUILLAUD tient le café.
Sur l’en-tête de la facture, non seulement le garage est présenté avec ses activités diverses mais aussi l’hôtel.
En 1936 m. BROUILLAUD est recensé comme « garagiste et hôtelier » et son épouse est hôtelière. dans l’immeuble habite Lydie GUILLOT qui est sage-femme.
A la fin des années 1930 M. René LASPERAS succède à M. BROUILLAUD. L’en-tête de la facture ne fait pas référence à l’hôtel<; le garage a conservé le même nom et il affiche « Citroën » dont il est agent sur le mur de la boulangerie.
Une facture du 30 septembre 1941
En 1947 rien n’a changé sur l’en-tête des factures.
Au milieu des années 1950 seule la couleur des factures change : le bleu remplace le noir.
Facture du 28 février 1958
Si l’hôtel a été fermé il reste le café du balcon très fréquenté les jours de foire mais aussi les jours d’enterrement par les hommes qui n’entrent pas dans l’église et par ceux qui attendent que la réparation de leur voiture soit terminée en prenant un petit verre…
Dans les années 1970 le garage quitte Citroën pour devenir agent FIAT et Bernard, le fils , devient associé à son père.
Facture du 27 décembre 1977
René LASPERAS n’était pas seulement un technicien de la mécanique c’était un homme engagé dans la cité. Très rapidement il devient pompier et souvent le garage fermait quand il y avait une intervention, le patron partait en intervention mais son ouvrier mécanicien, M. DEBORD, également pompier partait avec lui. M. LASPERAS a progressivement gravi tous les échelons pour devenir commandant de la compagnie de Nexon avec le grade de lieutenant. Son dévouement était unanimement apprécié dans tout le canton.
Lorsque son père a pris sa retraite son fils Bernard a conservé le garage mais il n’a plus fait de mécanique. Il a gardé la distribution d’essence et de gaz et a assuré les transports en taxi avec son épouse Andrée.
Facture du 31 aout 1985
Les pompes se sont modernisées et sont devenues électriques, la publicité sur le mur de la boulangerie a disparu.
Lorsque Bernard a pris sa retraite les Transports du Haut Limousin (THL) ont repris l’activité de taxi et se sont installés au numéro 4, à la place du coiffeur.
Aujourd’hui il n’y a plus d’activité commerciale au numéro 11. L’immeuble a été rénové dans le même style que son vis à vis du n° 1.
Notons que sur le côté droit, un escalier permet d’accéder aux appartements du numéro 12 de la place. Cette immeuble est distinct de celui du n° 11 et de celui de la boulangerie au n° 14 de la rue Victor Hugo. Les trois toitures sont différentes, et par la forme et par la couverture.
L’immeuble abrite 4 appartements dont certains donnent sur la rue Saint Ferréol..
Sur le plan d’alignement de 1901 l’immeuble situé au n° 9 actuel est appelé « maison GUYOT ».
Jean GUYOT figure dans le registre du recensement de 1886 avec son épouse Marie BARBARY et 3 de ses 8 enfants. L’un d’eux, Jules, est cordonnier. Il a 19 ans en 1886 et c’est lui qui va rester le plus longtemps dans cette maison.
Recensement de 1886
Jean GUYOT décède le 3 avril 1890 âgé de 70 ans. Il est déclaré propriétaire-cultivateur. Son épouse va continuer à habiter la maison avec son fils Jules. Il n’y a pas encore de GUYOT boucher et lorsque son petit-fils, Jean Baptiste GUYOT (1890-1972) choisira de ce métier comme le fera son fils Albert GUYOT (1921-2000) les gens pour les distinguer des autres familles GUYOT bouchers préciseront GUYOT-BABARY et parfois simplement BARBARY. J’ai souvent entendu les gens parler ainsi.
Le 26 mars 1905, Marie VILLOUTREIX, l’épouse de Jean GUYOT décède. L’acte de décès précise que son mari est cordonnier et qu’ils habitent place de l’église.
Décès de Marie VILLOUTREIX. Archives départementales de la Haute-Vienne
En 1906 Marie BARBARY est toujours présente. Elle a 73 ans. On notera que les épouses sont alors appelées par leur nom de naissance, pratique qui varie selon les époques. On notera également que souvent les prénoms changent selon les documents. En effet dans les familles il était habituel de donner les prénoms des parents et des grands parents pour les honorer. Ainsi Jean GUYOT né en 1779 a eu un fils qu’il a nommé Jean, né en 1820 lequel a donné ce prénom a deux de ses fils, Jean né le 28 mars 1860 et Jean né le 28 avril 1866. Tous les deux ont eu une épouse dont le prénom était Marie… Ceci conduit parfois à des erreurs que l’on rencontre sur les sites généalogiques!
Recensement de 1906
En 1907, le 14 mai, Jean GUYOT épouse Marie DUFOUR. Lors du recensement de 19011, contrairement à ma remarque précédente, Marie DUFOUR est nommée Marie GUYOT comme sa belle mère. Il faut faire attention à la date de naissance pour ne pas se tromper. Jean GUYOT est appelé Jules-Jean.
Recensement de 1911
De son premier mariage, Jean GUYOT a eu 2 enfants, Jean Baptiste né le 21 septembre 1898 et Hélène née le 24 décembre 1901. Ils sont tous les deux écoliers au moment du recensement en 1911.
Après la guerre de 1914-1918, le recensement de 1921 montre que Jules GUYOT est toujours présent avec sa fille Hélène âgée de 19 ans mais son épouse ne figure plus sur le registre. D’autres personnes résident dans la maison dont la famille DEBORD dont le père est tailleur.
Recensement de 1921
En 1925 il y a toujours Jules GUYOT et sa fille Hélène et la famille DEBORD qui s’est agrandie puisqu’il y a maintenant 5 enfants avec les parents.
Recensement de 1926
En 1931 Jules GUYOT est toujours cordonnier et sa fille habite encore avec lui. Les DEBORD ne sont plus là et l’appartement qu’ils occupaient a été loué à Denise PAROT et ses deux enfants.
Recensement de 1931
En 1936 les GUYOT sont toujours présent. Il n’y pas d’autre famille dans l’immeuble.
Il y eu ensuite l’antenne nexonnaise de la régie d’électricité devenue EDF par la loi de nationalisation du 8 avril 1946. Puis M. et Mme. DELIAT y sont venu. Marie Jeanne DELIAT, née COUVIDOU (1920-2010), y tenait un atelier de couture. Ma mère y faisait faire ses manteaux et ses tailleurs et nous l’accompagnions souvent lorsqu’elle allait choisir les modèles et procéder aux essayages. M. Louis DELIAT (1918-1992) était coiffeur à la gare. Il était également apiculteur amateur et élevait des poules qui lui ont donné des œufs sortant de l’ordinaire :
Les œufs « géants » de M. DELIAT en 1984
En janvier 2013 Les Ateliers de l’Esperluette* y ouvrent une galerie d’art. L’exposition inaugurale (juillet-septembre 2013) était intitulées « La légèreté des pierres ». La dernière, perturbée par la crise de la COVID, était consacrée à « l’horizontale ».
L’esperluette est le signe &, une liaison du « e » et du « t ». Si on prononce en occitan es-per-lou-et cela se traduit par : C’est pour le « et ».
Au numéro 10 on trouve la « maison LELONG », au débouché de la rue St Ferréol. C’est une maison à la construction particulière. Le mur latéral s’amenuise en s’élevant, on dit que c’est le fruit du mur. Il est fait pour garantir sa solidité et sa résistancecdu mur.
boucherie LELONG
Fruit du mur
Pendant plus de trois siècles cette maison a appartenu à la famille LELONG qui y a exploité une boucherie-charcuterie. Le premier de cette lignée est François LELONG, né en 1676 et mort en 1757. Parmi ses enfants on trouve un des aubergistes, des cordonniers, des boulangers, des bouchers, des médecins… Parmi eux François LELONG (1861-1925) qui fut maire de Nexon de mars 1904 à novembre 1919 et aussi le docteur François Philibert LELONG (1870-1956). Sa fille Lucienne, épouse du Dr. Marcoff, à son décès fit don de son patrimoine à la commune.
Lors du recensement de 1896 Laurent LELONG (1832-1927) est le patron de la boucherie. Il est le descendant à la sixième génération de François LELONG (1676-1757). , père d’une longue lignée de bouchers, de boulangers, de médecins et aussi de François LELONG (1861-1925)
Laurent LELONG est avec son épouse, Jeanne COMBROUZE, et ses deux fils Pierre LELONG (1858-1926) marié à Augustine LABREGERE et Jean LELONG (1880-1950) qui a 22 ans de moins que son frère Pierre. Trois enfants de Pierre vivent également avec eux comme cela se faisait à l’époque où trois générations vivaient sous le même toit.
Recensement de 1896
En 1901 Laurent LELONG est toujours le patron; Il travaille avec son fils Pierre et son petit fils Jean comme apprenti.
Recensement 1901
Laurent LELONG a plus de 70 ans continue a diriger la boucherie. Son fils Pierre et ses petits enfants prennent petit à petit la suite.
1906
1911
Après la guerre de 1914-1918, André et Baptiste ont pris les rênes de l’affaire.
1921
1926
1931
André est resté célibataire tandis que son frère Jean-Baptiste a épousé, le 11 mai 1925 à Nexon, Françoise VIALLE, sa voisine de la rue du Centre (aujourd’hui Victor Hugo) ; leur fille, Yvette (1926-1987), a épousé en 1948 Michel COURAUD, pépiniériste en Creuse.
Mariage Michel COURAUD et Yvette Lelong. source : legermariefr
la boucherie LELONG était une boucherie très réputée avec un importante clientèle qui allait bien au-delà de la commune de NEXON.
A la fin des années 1960, lorsque tous les LELONG prirent leur retraite la boutique fut louée à l’auto école REYTIER. Celle ci y exerça son activité du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1997.
A la fermeture de l’auto-école, Paul BUFORN quitte Limoges et y installe son atelier d’émailleur. C’est un Maître émailleur de renommée internationale qui a gagné en 1990 le Grand Prix du public de la Biennale Internationale de l’émail et en 1992 le Prix National du Travail Manuel.
En 2016 il arrête de créer et transforme son atelier en musée où il aime accueillir tous ceux qui ont envie de découvrir l’artiste et ses œuvres. En entrant on est surpris de trouver en vitrine des vélos, son autre passion. Il cherche des vieux vélos qu’il rénove et qu’il utilise pour parcourir les dizaines de kilomètres quotidiens qu’il effectue sur les routes du Limousin.
En continuant le tour de la place, ayant traversé la rue Victor Hugo, on se trouve en face d’une grande maison portant le numéro 5. Elle faisait partie du domaine du baron de Nexon qui y logeait son régisseur ou d’autres salariés du haras. Elle n’était pas particulièrement bien entretenue jusqu’à ce qu’elle soit vendue à un particulier qui a fait refaire les crépis et les peintures.
Avant 1914
En 2020
Façade « est » avec niche
La niche avec sa statue
Parc
Pendant les années 1900-1910 le régisseur est Alfred DESMAISON. Il y habite avec son épouse et sa fille. Les 3 servantes sont sans doute employées au château.
recensement de1901
recensement de 1906
Après la guerre de 1914-1918 on constate que les résidants sont palefreniers, cuisiniers, servantes… Une partie du personnel du château est logé dans cet immeuble.
Après la seconde guerre mondiale on retrouve les mêmes catégories de résidents. Le dernier régisseurs, le dernier en date ayant été M. Louis FABRE. Au début des années 1970, l’annuaire des abonnés au téléphone indique Nexon, Haras et domaine de, 5 place de l’église
Annuaire 1976
En 1999 l’immeuble et ses dépandances ont été achetés par l’antiquaire Michel NAUDET. En 2021 l’ensemble est en vente.
Les jours de foire, pendant longtemps les 16 de chaque mois, le marché des porcs se tenait devant l’entrée du château et face à l’immeuble du régisseur.
Sur cette carte postale on peut constater que le marché aux cochons est animé. Les hommes sont en blouse bleue ou noire et portent un chapeau de feutre plat. Les femmes, peu nombreuses ici, sont en robe avec fichus et ombrelle. Le marché aux volailles quant à lui se tient devant la sacristie de l’église et celui des bovins sur le foirail en face de la poste.
Les marchands se plaignaient de ne pas pouvoir embarquer sur place les animaux qu’ils achetaient. En effet la place est vide de tout quai d’embarquement.
Un quai pour le chargement des porcs a été construit en 1922 et il existe toujours, bien qu’il n’y ait plus de foire depuis longtemps.
Le quai d’embarquement en 2021
N° 6, la conciergerie du château à l’entrée de la cour d’honneur.
C’était autrefois l’entrée de la loge du concierge. C’est devenu l’Office de Tourisme. Une partie du personnel du château logeait dans la tour et la construction attenante. Elle est suffisamment vaste pour accueillir plusieurs couples.
N° 6 Actuellement l’Office de Tourisme occupe la tour et le bâtiment accolé.
Au coin de la rue Saint Ferreol, qui s’appelait autrefois la rue du Midi, il y avait des urinoirs. On constate sur la photo précédente qu’ils n’y sont plus.
L’urinoir au coin de la rue saint Ferréol
Après le débouché de la rue St Ferréol sur la place, on trouve un ensemble de 5 immeubles. Un croquis d’alignement approuvé par le préfet en 1901 permet d’identifier les propriétaires de ces immeubles à l’époque.
Plan d’alignement 1901
N° 7, les cartes postales du début du siècle montrent une grande maison de deux étages avec des mansardes en toiture. C’était l’une des nombreuses auberges de Nexon qui en comptait 25 en 1905.
n°7 avant 1910
n° 7 en 2021
En 1843, le 3 juillet, Emile GIZARDIN, s’engage par écrit à ne pas nuire à son voisin Pierre LELONG par la construction qu’il fait à la place du poulailler. Mais il ne dit pas l’usage qu’il va faire de l’agrandissement de sa salle. Est-ce une salle de restaurant ?
Emile GIZARDIN (1808-1875) était le fils de Léonard Dit Pierre GIZARDIN (1771-1854). Comme son père, Emile était aubergiste place de l’église. Son fils Ferdinand (1841-1910) n’a pas continué l’activité de son père. Il a du quitter Nexon puisqu’il est mort à Limoges le 8 février 1910. Il avait sans doute rejoint son jeune frère Antoine qui avait épousé Berthe BERTRAND, héritière du magasin de chaussure « A la grâce de dieu ». J’ai raconté son histoire ici : https://etsinexonmetaitconte.fr/?s=a+la+gr%C3%A2ce+de+dieu
Au recensement de 1886 on constate qu’un plâtrier, Jean TREBUCHERE, et sa famille habitent l’immeuble avec deux ouvriers plâtriers. Son épouse est débitante aubergiste. L’auberge fonctionne donc encore.
Recensement de 1886
En 1890, aux mois de mai et de juin, plusieurs annonces sont publiées dans la Courrier du Centre pour louer la maison dont on dit qu’elle sert d’auberge avec écurie.
Le Courrier du Centre 26 mai 1890
Jean TREBUCHERE décède à Nexon le 8 juin 1894 à l’âge de 50 ans.
En 1896 la patronne de l’auberge est Louise Herminie BONNET (1849-1901). Elle a 45 ans et elle est veuve. Son mari, Louis RICHARD (1839-1889), est décédé à 49 ans. Il était marchand de vin en gros. Elle travaille avec ses deux enfants Arthur et Paul RICHARD qui sont voituriers. Elle emploie deux domestiques dont l’un est boulanger. On peut donc penser que l’auberge a une bonne clientèle.
Recensement de 1896
Au recensement de 1901 la famille BONNET-RICHARD n’est plus présente, l’auberge est tenue par Marcelle AUROYER et Ferdinand GIZARDIN y habite avec une servante.
Recensement de 1901
C’est la maison GIZARDIN du plan 1901. Ferdinand GIZARDIN, rentier de 58 ans est célibataire et s’il est rentier c’est qu’il est issu d’une famille de la bourgeoisie nexonnaise. Un des premiers GIZARDIN de cette lignée, Pierre, était apothicaire à Nexon au début des années 1700. Son fils Mathurin GIZARDIN (1692-1762) fut notaire ainsi que son petit-fils Nicolas GIZARDIN (1742-1806). Léonard GIZARDIN (1771-1854), fils ainé de Nicolas, était aubergiste à Nexon en 1823. Ayant acheté une propriété à Saint Hilaire les Places il s’y installa et fut adjoint au maire. Gabriel GIZARDIN (1789-1866), jeune frère de Léonard, fut épicier à Nexon ainsi que son fils Léonce GIZARDIN (1859-1922). Ceux-ci habitaient au numéro 11 actuel.
Mais, avant 1910, l’immeuble va changer d’allure. Des 2 étages avec 4 fenêtres en façades et 4 chambres mansardées il ne reste plus qu’un seul étage avec 3 fenêtres en façade et il n’y a plus de mansardes sur le toit.
La place de l’église dans les années 1930
N° 7 inoccupée en avril 2021
A l’arrière de la maison est accolé une autre habitation entourée d’un jardin. Un vieille pompe à main est accolée au mur.
Arrière du n° 7 inoccupée
La pompe à eau à main
Ce n’est plus un établissement qui reçoit du public mais la maison d’un cordonnier. En 1921 c’est Edmond TRUCHASSOU qui y est avec son épouse Anne. Il a avec lui un jeune apprenti, André DESBORDES.
En 1926 c’est Antoine DEBORD (1885-1978) qui est cordonnier-sabotier. Il a épousé Zélie LATOUILLE le 29 avril 1920 et ils ont eu en 1925 une fille, Berthe. Elle a été assistante sociale à Nexon et était très appréciée des nexonnais . C’était une camarade du docteur Rose FORGERON-VIGNERON qui me parlait souvent d’elle.
Recensement de 1926
Puis ce fut le cabinet de madame le docteur GARNIER. Elle comptait s’installer à Nexon mais cela ne s’est pas fait. Il eut ensuite plusieurs propriétaire et actuellement, début 2021, elle n’est pas occupée.
Au n° 8, une maison avec perron, « Maison TOURENNE » sur le document d’alignement de 1901 vu précédemment. Il s’agit d’un immeuble qui appartenait à Pierre LELONG (1806-1877) dont sa fille Marie (1846-1919) avait. Elle avait épousé Elie TOURAINE à Nexon le 9 juin 1866 et elle est parti habiter à Limoges. A son décès le 2 janvier 1919 sa fille Léonie TOURAINE en a hérité pour moitié avec sa sœur Jeanne, épouse LANTERNIER. Elles l’ont très rapidement vendu à Pierre DUROUX, l’acte étant signé le 25 janvier 1920.
C’est lui qui figure comme résidant au recensement de 1926. Avec son épouse Marie il y a également leur fille. En 1926 elle s’appelle Jeanne née en 1922 et en 1931 son nom est Berthe, également née en 1922!
Recensement de 1926
Quand les BONNET quittent leur logement celui-ci est loué à Emile LELONG qui y ouvre une boucherie. Les DUROUX sont trois, Monsieur, Madame et leur fille Berthe née en 1922.
Recensement de 1931
En 1936 la fille DUROUX n’est plus chez ses parents. Comme elle a 14 ans, elle devait être pensionnaire au moment du recensement. Chez les LELONG, Emile est appelé Octave mais il s’agit de la même personne. En effet les enfants avaient souvent 3 prénoms, les deux premiers étaient ceux des grands parents et c’était le 3ème prénom qui était le prénom d’usage. La boucherie est très connu à Nexon et, sans doute pour ne pas la confondre celle de leurs cousins au n°10, les gens parlaient de la boucherie « Chez Milord ». Les anciens se souvenaient des tournées qu’il effectuait à cheval dans les villages alentours.
Recensement de 1936
A la mort de Pierre DUROUX le 27 aout 1936, quelques mois après son épouse Marie, l’un des quatre enfants, Adrien Jean, achète la part des ses deux frères Aimé et Henri et de sa sœur Marie Louise. Il confirme la location à M. LELONG et loue l’étage à M. DUDOGNON, cordonnier. Maintenant il y a deux locataire dans la maison.
N° 8 de la viande est pendue à la porte.
A la fin de la guerre M. DUROUX décide de vendre son immeuble. Le 23 janvier 1948, chez Me GARRAUD, il signe l’acte de vente au profit de M. et Mme LASCAUX habitant à Meilhac. Il donne congé à ses locataires.
23 janvier 1948- Vente par M. et Mme Jean DUROUX à M. et Mme LASCAUD
M. et Mme LASCAUX viennent y habiter avec la famille de leur fille Marcelle. Celle-ci a épousé Paul DESSELAS (1919-1985). Du mariage naitront deux garçons, Gérard (1944-2019) et Jean Marie, bien connus à Nexon.
La maison a deux entrées, l’une au 8 place de l’église et l’autre au 11 rue Saint Ferréol. De ce fait il est facile de loger deux familles. Une grange et un jardin, situés rue saint Ferréol, font partie de la propriété.
11 rue Saint Ferréol
Grange du 8 place de l’église et du 11 rue Saint Ferréol donnant sur le jardin
Les enfants n’étant plus à la maison, le 18 mai 1976, M. et M. DESSELAS louent une partie de leur maison à la mairie de Nexon au profit de l’amicale du 3ème qui vient de se créer. A l’échéance du 30 juin 1988 le bail n’est pas renouvelé.
Après le décès de Mme Marcelle DESSELAS, le 13 janvier 2014, la maison va être mise en vente.
Elle est achetée par M. Bernard BEAUFILS qui y entreprend d’importants travaux afin de la transformer en chambres d’hôtes. La belle cheminée en pierre est mise en valeur dans la pièce d’entré avec son dallage en pierre. je ne sais pas ce qu’est devenu le sous-terrain dont Jean Marie me parlait et qu’il avait exploré avec ses copains quand il était jeune. Ce sous-terrain partait de la cave et se dirigeait vers le Nord, en direction du parc du château. Il était suffisamment haut pour qu’un personne se tienne debout. Son exploration n’a pas dépassé quelques dizaines de mètres et n’a pas permis de découvrir sa sortie.
La belle cheminée en pierre et le sol en pierres
Le décès de M. BEAUFILS, en juin 2020, alors que les travaux n’étaient pas terminés, amène son fils à mettre de nouveau en vente l’immeuble.
Avril 2021
Merci à Jean Marie DESSELAS pour toutes les informations et documents fournis.
L’Eglise Saint-Jean-Baptiste de Nexon, est au cœur de cette place à laquelle elle a donné son nom.
La place est délimitée à l’ouest par la rue d’Arsonval. Cette rue a été tracée à la fin du XIXe siècle et s’appelait alors rue Nouvelle. De même la rue Victor Hugo qui traverse la place n’existait pas. La traversée de Nexon s’effectuait par la rue Gambetta et son prolongement la rie Pasteur L’accès à la place de la république n’était possible qu’à pied, une construction, le numéro 100 du plan napoléonien (croix rouge sur le plan), était au milieu de l’actuelle rue. Sur le plan Napoléonien ci-dessous, les deux voies de circulation anciennes sont en bleu et les voies nouvelles en jaune.
Sur la place les maisons sont numérotées de 1 à 12 en partant de la rue d’Arsonval et en tournant dans le sens des aiguilles d’une montre pour revenir en face de la rue d’Arsonval.
Le numéro 1 a été attribué à la maison située à l’entrée de la place en venant du bourg. Cette maison n’existe pas sur le plan napoléonien. Les visiteurs pensent souvent qu’il s’agit de l’ancien presbytère ; Il n’en n’est rien, même si l’histoire dit que cette maison aurait été construite par un riche curé et qu’il l’aurait léguée à ses deux nièces…
Dans les années 1930 elle était habitée par la famille PINGARD, Victor PINGARD étant inspecteur à la Compagnie Paris-Orléans.
Recensement de 1936
En 1942 ou 1943 une photo prise pendant une fête religieuse la montre sans éclat, les volets non peints contrairement à ceux de la maison voisine, rue d’Arsonval.
Après la deuxième guerre Mme PINGARD vit avec les BRIDGELAND, la maison ne change pas d’aspect et elle est très souvent fermée.
Rachetée dans les années 1980 par la famille PAUZET, la maison a été remarquablement restaurée.
N° 1 place de l’église en 2020
Le numéro 2, se situe de l’autre coté de l’église. L’accès se situe entre la sacristie et la maison des n°3 et 4.
Les bâtiments du n° 2 encadrés en jaune
En 1896 y est installé François COUVIDOU (1839-1915) qui est marchand de bois et son épouse Babet FAUGERE (1844-1918) déclarée aubergiste au recensement de 1896. A cette date 4 enfants vivent avec eux, Simon (1862-1908), marchand de bière, Anna, Marie et Emile.
Recensement de 1896
En 1901 et en 1905 François et Simon sont toujours présents et exercent les mêmes activités. Une des filles COUVIDOU, Marie, épouse Jean QUINQUE (1861-1942) et après avoir habité au Courdein ils s’installent place de l’église où Jean va exercer son métier de tonnelier.
En 1911 Jean QUINQUE et son épouse sont installés avec leurs fils Edmond et Simon, tous les deux tonneliers avec leur père. Ils vivent avec une partie de la famille COUVIDOU. François a 72 ans et il est toujours marchand de bois, sa fille Amélie est couturière et son fils Emile est sellier, son épouse aubergiste. Simon COUVIDOU qui était marchand de bière est décédé en 1908 à l’âge de 46 ans.
Recensement de 1911
Jean QUINQUE a eu deux enfants, Edmond (1886-1975) et Simon (1890-1957). Edmond est resté à Nexon ou il a ouvert un commerce de bière et charbon et Simon qui était tonnelier est parti à Paris puis en Belgique comme représentant.
Le 5 octobre 1911 à Nexon, Edmond QUINQUE a épousé Marie BEYRAND (1892-1985).
Mariage d’Edmond Quinque et Marie Beyrand. Les parents du marié, Jean et Marie Quinque sont à droite, ceux de la mariée à gauche. Simon, le frère du marié, est debout, derrière sa mère. [Geneanet arbre Pascal LEMERCIER (gropif)]
Comme tous les garçons nés entre 1870 et 1896 ils ont fait leur service militaire d’une durée de deux ans et ils ont été rappelés en 1914. Edmond a effectué son service militaire du 7 octobre 1907 au 25 septembre 1909 qu’il a terminé comme brigadier. Rappelé le 3 aout 1914, il est fait prisonnier le 23 aout. Rapatrié d’Allemagne le 3 janvier 1919 il est démobilisé le 15 avril 1919. Son frère Simon a été appelé le 9 octobre 1911 pour rejoindre la 20e section de commis et ouvriers d’administration (20e SCOA) en Algérie. Il termine son service en novembre 1913 avec le grade de sergent. Rappelé le 4 aout 1914 il est revenu à la vie civile le 21 aout 1919 avec le grade d’adjudant. En 1939 il a été rappelé le 1er septembre 1939 et renvoyé dans ses foyers le 28 octobre 1939. On mesure les perturbations que plus de 6 ans passés sous les drapeaux, dans des conditions souvent très difficiles, entrainent pour la vie personnelle, familiale et professionnelle.
Edmond a eu deux enfants , Aimé (1913-1985) et Simone (1919-2013). Simone a épousé Jean Alfred COMBEAU et a effectué un beau parcours comme cadre supérieur à la Banque de France. Aimé est resté à Nexon et a travaillé avec son père.
Au recensement de 1936 , Jean QUINQUE et son épouse, son fils Edmond et son épouse, ses petits enfants Aimé et Simone ainsi que les beaux-parents d’Edmond vivent ensemble.
Recensement de 1936
Jean QUINQUE est décédé en 1942 et son épouse en 1945.
Le Populaire 9 novembre 1945
En 1942 également, le 24 octobre, Aimé QUINQUE a épousé Maria DESMOULIN (1919-1990 ). De ce mariage naitra leur fille Marie Françoise.
Edmond a développé son activité de brasseur et de marchand de charbon avec le concours de son fils Aimé.
Quand Edmond a pris sa retraite Aimé à continué uniquement le commerce de la bière.
L’immeuble qui abrite les numéros 3 et 4 actuels n’a pas toujours eu la même physionomie. On peut suivre son évolution sur les différentes cartes postales qui ont été publiées.
Agrandissement d’une carte postale postée le 27 novembre 1901
Sur cette agrandissement on voit qu’à la maison a été adossé un appentis. De droite à gauche on trouve une épicerie, tenue par Léonard DELIRAND, un tailleur et un zingueur, Henry CHARREIX.
Recensement de 1896
En 1905 la structure de l’immeuble n’a pas changé mais à la place d’Henry CHARREIX, zingueur, on trouve un sellier-bourrelier Emile COUVIDOU.
Vers 1910 l’appentis est démoli et l’ensemble de l’immeuble va être modifié.
La démolition de l’appentis et la reconstruction de l’immeuble.
Le nouvel immeuble est plus imposant que le précédent et il y a toujours trois activités mais seulement deux vitrines. A gauche le coiffeur et la buvette et à droite l’épicerie est toujours là.
Le coiffeur est François DEBORD, né à Nexon le 4 janvier 1892. Lorsqu’il épouse Marguerite PORTEFAIX il est déjà coiffeur. On notera que dans l’immeuble loge une infirmière, Marie CHABAUD, âgée de 60 ans.
Recensement de 1921
Pour le recensement de 1926 deux enfants sont nés dans la famille DEBORD, André en 1921 et Jean en 1923. Un autre coiffeur arrive, logé chez les DEBORD, Emile GOURINCHAS né en 1899. En 1931 il est rayé des listes électorales mais son épouse est recensée comme coiffeuse. Un garçon coiffeur, JANIN, est logé dans l’appartement.
Recensement de 1931
Un peu avant la seconde guerre mondiale l’épicerie devient buvette. Il y a ainsi deux buvettes pratiquement l’une à coté de l’autre.
Au numéro 3, lorsque le commerce a fermé l’immeuble est resté la propriété de la famille DEBORD dont le fils Jean était mécanicien chez M. LASPERAS.
Recensement de 1936
Dans les années 1960-70 le logement a été occupé par différentes personnes, en particulier l’entreprise de taxi qui a pris la suite de Bernard LASPERAS qui exerçait son activité au n° 11 de la place. L’entreprise CTRE AMBULANCIER ET FUNERAIRE LIM PERIGO était situé à Solignac a fonctionné de mai 1997 à octobre 2002.
En janvier 2008 la société Puissance Analyse y a exercé son activité du commerce de gros de composants et d’équipements électroniques et de télécommunication. En 2021 elle est installée à la ZA des Gannes.
Le numéro 4 . Un jeune coiffeur arrivé de Creuse, Georges ANDRE, le 10 septembre 1934 épouse une jeune nexonnaise, Marie Madelaine BONNAUD âgée de 20 ans.
Recensement de 1936
Georges et Marie Madelaine que les clients appelleront vite « La Madelon », vont travailler ensemble. Le salon et la buvette passent à droite de l’immeuble, Georges coupe les cheveux, son épouse fait les barbes.
Georges ANDRE à un banquet du foot;
Comme tous les salons à cette époque il n’y avait pas de rendez-vous. On attendait souvent une heure, surtout quand nous étions enfants, les adultes étaient prioritaire et le coiffeur s’arrêtait de temps en temps pour aller trinquer avec ses clients. Le charme résultait des discussions sur tous les sujets, chasse, pêche, mais surtout foot dont Georges était un inconditionnel et un dirigeant fidèle. Son épouse servait les clients qui attendaient leur tour à la buvette. La pause casse-croute du coiffeur vers 16h30 était sacrée ce qui permettait aux clients en attente de prendre une nouvelle consommation et pour ceux qui ne buvaient pas, comme mes frères et moi quand nous étions gamins, l’attente s’allongeait et nous plongions alors dans la lecture des Mickey et autres journaux pour enfants qui s’empilaient sur la table. Pour nous la coupe était simple, une brosse et les trois garçons nous avions la même tête!
Avec mas frères Daniel et Michel, Alain derrière à gauche, tous la même coupe de cheveux. 3 mai 1959
Lorsque Georges André a pris sa retraite il a été remplacé par Marc.
Puis par les Ambulance-Taxi BARRAUD Père et fils. Aujourd’hui il n’y a plus de commerce au numéro 4.
La ruelle qui fait l’angle du salon de coiffure était principalement empruntée par les chevaux qui sortant des écuries de la cour du château descendaient dans les près devenus aujourd’hui des lotissements. Elle a été baptisé au début des années 2000 « passage Pocheros » (prononcer peau-chair-os) du nom la Compagnie Pocheros fondée en 1993et composée d’anciens élèves du Centre national des arts du cirque. Elle est venue à Nexon plusieurs fois.
Le Passage Pocheros de la place de l’église vers la rue Pasteur.
le château depuis le passage
Au milieu du passage Pocheros
Au bas du passage Pocheros
L
Le long du mur, en allant vers le château une belle fontaine où s’abreuvaient les chevaux.
Les chevaux s’abreuvent en descendant au pré. Au premier plan la bascule.
Au milieu de la place, devant la sacristie se tenait la bascule publique. Le mécanisme était abrité dans une construction en pierre de forme carrée, coiffée d’un toit à quatre pans couvert en ardoises surmonté d’un épis en zinc. le fonctionnement de la bascule était assuré par M. et Mme QUINQUE.
Merci à Marie Françoise QUINQUE-GRIZON pour les souvenirs échangés et les précisions apportées.
Lorsqu’en 1810, le Juge de Paix qui ne savait pas où loger ses délinquants sollicite le maire Nexon il n’y a pas encore de gendarmerie dans la commune. Il propose de transformer la petite chapelle qui se trouvait dans le vieux cimetières, en haut de l’ancien champ de foire, aujourd’hui place de la République. C’était un petit bâtiment d’à peine 50m2.
Lorsque la brigade de gendarmerie a été créée, il a fallu loger les gendarmes. On a donc cherché une maison assez grande pour loger au moins cinq familles. Ce type de maison n’était pas rare et il y avait des propriétaires qui étaient disposés à les louer. Notons que dans certains cantons les gendarmes étaient logés dans une caserne appartenant au département. C’était le cas, dès les années 1840, à Limoges, Saint Léonard, Rochechouart…
A la création de la brigade de Nexon les gendarmes ont été logés dans la maison d’un propriétaire privé dont le département payait le loyer. C’était le cas de la majorité des brigades en Haute-Vienne où, jusqu’en 1850, seules les casernes de Limoges, Rochechouart et Saint Léonard appartenaient au département.
1 – La caserne dans l’immeuble BONNET (1854-1881)
On ne connait ni le propriétaire ni le loyer qui était payé au premier propriétaire. On trouve d’un loyer à M. BONNET lorsque le Conseil Général a négocié le renouvellement du bail qui arrivait à échéance le 1er janvier 1873. Le propriétaire souhaitait une augmentation du loyer tandis que le Conseil Général n’était pas favorable. Mais faute de trouver un local satisfaisant aux exigences de la gendarmerie M. BONNET a obtenu satisfaction et le bail fut renouvelé.
En 1881 M. BONNET ne souhaite pas prolonger le bail de son bâtiment avec la gendarmerie. Le Conseil général en prend acte et cherche un autre immeuble.
Ou se trouvait la gendarmerie jusqu’en 1881 ? Lors des recensements de 1836 et de 1841 les immeubles du bourg ne sont pas classés par rue. Les familles des gendarmes apparaissent immédiatement après les habitants du château et de ses dépendances. On peut donc penser que la gendarmerie se situait sur la place de l’église. Quant à M. BONNET, le propriétaire de la gendarmerie, il s’agit sans aucun doute de la famille de Mathurin BONNET (1761-1840), aubergiste rue du Nord dont le fils, Jean Baptiste BONNET (1819 – 1896) est déclaré propriétaire en 1841 alors qu’il n’a que 21 ans. Il entamera des études de notariat puis deviendra commerçant à Limoges et sera nommé maire de Nexon par décret le 15 fevrier 1878.
2-La caserne dans l’immeuble FRUGIER (1881-1910)-BONNAFY Pierre Arsène (1852 – 1937)
M. BONNET ne voulant plus louer à la gendarmerie, le département fait affaire avec M. FRUGIER.
Conseil Général – Première session ordinaire 1881
Maintenant le recensement classe les maisons par rue et la gendarmerie est clairement située route de la gare, notons que cette dénomination correspond à une partie de la rue Gambetta actuelle. Les cartes postales du début des années 1900 permettent de situer la gendarmerie dans la maison qui abrite aujourd’hui le restaurant MASSY.
Propriété des FRUGIER, l’immeuble tombera dans le patrimoine des BONNAFY après le mariage en 1885 de Jeanne FRUGIER (1864-1941) avec Pierre Arsène BONNAFY (1852-1937), d’abord Greffier de le justice de paix du canton de Nexon puis Juge de paix.
En 1898 au moment d’une nouvelle négociation du bail, le maire de NEXON, M. THOMAS, demande au Conseil Général un délais afin de chercher un autre immeuble, plus proche du centre du bourg car il trouve la caserne, situé à 800 mètres du centre, trop éloignée.
Conseil Général 1898
Les recherches ayant été vaines, dans sa session d’aout 1898, le Conseil Général renouvelle le bail avec M. BONNAFY jusqu’en 1911.
Conseil Général 1898
En 1910, lors de la négociation pour le renouvellement du bail, M. BONNAFY demande une augmentation que le Conseil Général trouve trop élevée. Les recherches pour trouver un immeuble moins cher sont tout aussi vaines qu’en 1898. L’hypothèse de la construction d’une gendarmerie est envisagée mais le terrain pressenti appartenant au baron de Nexon est jugé trop cher. Finalement les Conseillers trouvent le loyer plus avantageux qu’une construction neuve et le bail est renouvelé avec M. BONNAFY.
Conseil Général 1910
Sur trois cartes postales de Nexon on voit la gendarmerie située rue de la gare. Sur les deux premières elle est en gros plan sans que l’on puisse déterminer la date du cliché. Sut la troisième carte on voit la gendarmerie sur le côté de la rue.
Collection F.G.R.
La croix au dessus du chef de brigade pouvait laisser penser que son nom figurait au verso, mais le verso ne comporte aucune correspondance.
C’est la même chose sur une autre carte postale.
Une troisième carte ne montre pas la gendarmerie de face, on l’aperçoit en montant à droite, cerclée en jaune. Au delà de la gendarmerie on peut admirer la tenue des dames pour la promenade du dimanche. Les piétons ne sont pas gênés par la circulation, les seuls véhicules sont les carrioles comme celle qui descend vers la gare sur la gauche de la carte postale.
En 1923 le bail arrive à échéance. Du fait de la guerre de 1914 – 1918 les prix ont augmenté et M. BONNAFY demande une hausse du loyer. De 1 400 francs par ans il passera à 3 000 francs; Le Conseil Général n’a pas de marge de manœuvre non seulement parce que de telle augmentations ont été acceptées pour d’autres brigades et surtout, à Nexon, il n’y a pas de solution de rechange. On notera que le nouveau bail est négocié pour trois ans et plus sur 12 ans. Il semble en effet difficile de s’engager pour une longue durée quand on n’a pas d’idée de la hausse des prix possibles et il semble qu’il n’y a pas de clause d’indexation de prévue.
Conseil Général 1923
Lors des réunions du Conseil Général de 1925 la négociation du nouveau bail est abordée. Une hausse du loyer de 1 000 francs est acceptées et le bail est signé pour 9 ans. De plus le propriétaire a accepté de faire pour 3 000 francs de travaux et les logements satisfont les gendarmes.
Conseil général 1925
Au début de l’année 1931 un texte législatif, la loi du 31 mars 1931, prévoit que les loyers versés pour les casernes par les départements sont remboursées par l’Etat. cela ne change rien pour les gendarmes et pour les propriétaires mais réduit les charges des départements.
Conseil général 1934
M. Bonnafy consent à renouveler le bail et propose un loyer de 7 000 francs que le Ministre des Armées accepte et de ce fait le département accepte la proposition.
Conseil Général 1934
En 1944 le bail a été renouvelé avec la famille BONNAFY mais deux inconvénients vont faire que la mairie de Nexon va chercher un autre immeuble. Le premier argument qui avait déjà été évoqué en 1898 par le maire, M. THOMAS, est celui de l’éloignement du centre du bourg. le second est le manque de confort et l’exiguïté des appartements qui ne correspondent plus aux besoins d’une famille avec des enfants.
3- La gendarmerie rue Champlain (1954-1971)
La mairie de Nexon se met donc en quête de trouver un nouvel emplacement pour la gendarmerie. Un grand bâtiment existe, à coté des écoles, au croisement de la rue Champlain et de la rue Lavoisier. Ces bâtiments appartiennent à la famille PAPEL qui possède également les terrains qui sont autours et sur lesquels sera construite la salle des fêtes.
L’emprise de la gendarmerie est encerclée en jaune sur le plan cadastral suivant. Un grand bâtiment longe la route et entoure une cour dans laquelle est construit un petit immeuble. L’immeuble est mitoyen de l’école dont il est séparé par le mur de l’école maternelle.
Le conseil municipal se met d’accord avec le famille Papel et achète les bâtiments pour 6, 3 millions de francs ( ce qui équivaut, en pouvoir d’achat, à 145 000 euros en 2020) et engage des travaux pour 5 millions de fracs. Pour financier cette dépense la commune emprunte 11, 3 millions de francs à 6% sur vingt ans à la Caisse des Dépôts et des Consignations.
Quand on passe devant ces bâtiments aujourd’hui on a du mal à imaginer que c’était la gendarmerie.
en montant la rue Champlain
en descendant la rue Champlain
la porte d’entrée
On voit de suite que le bâtiment est beaucoup plus spacieux que celui de l’avenue de la gare. En s’approchant du porche, sur l’arc, on devine sous la couche de peinture blanche, de « République Française « .
On devine au centre les lettres R et F, plus difficilement Gendarmerie nationale
Je n’ai pas de photos de l’intérieur de la caserne de l’époque ou la gendarmerie l’occupait si ce n’est la porte d’un cachot qu’avait photographié Jean ATZEMIS :
La porte de la prison -Photo J. ATZEMIS
Une visite à l’école élémentaire m’a permis de faire des photos qui rendent compte de ce qu’était la caserne. Le bâtiment principal qui longe la rue Champlain n’a pas changé. La sirène que déclenchait le gendarme de service pour alerter les pompiers est toujours sur le toit. Les salles du rez de chaussée sont utilisées par l’école élémentaire et les appartements des étages sont loués. Sur le sol de la cour sont dessinés les aires de jeux et d’apprentissage d’activités physique. A gauche le porche d’entrée par la rue Champlain n’est pas utilisé.
L’ancienne caserne de gendarmerie le 9 avril 2021 Seules les marques sur le sol laissent deviner que ce n’est pas une caserne
A l’extrême droite de la cour se trouvent 5 cachots. Seuls les deux premiers étaient utilisés à cet effets, les trois autres qui n’ont pas de grille sont en fait des caves. Elles sont attribuées aux locataires des appartements et à l’école. La vue d’ensemble est altérée par le plan incliné qui permet d’accéder à l’école pour les personnes qui souffrent de handicap.
La maison qui était au centre de la cour dans laquelle logeai le commandant de brigade et une autre famille de gendarme a été démolie pour laisser la place à la nouvelle école élémentaire.
L’école primaire construite à la place de la maison des gendarmes
Les gendarmes seraient peut-être restés plus longtemps rue Champlain mais le nombre des élèves augmentant il fallait agrandir l’école. Dès le milieu des années 1960 la question d’une nouvelle gendarmerie c’est posée. Il était évident qu’il fallait une construction neuve.
Le Conseil Municipal du 11 septembre 1968, afin de permettre l’extension du groupe scolaire dans la gendarmerie et le jardin décide d’acquérir un terrain pour construire une nouvelle gendarmerie et un centre de secours incendie. Le pré jouxtant le terrain acheté par la commune pour agrandir le cimetière est acquis aux consorts PRADIER ainsi que 32m2 à M. Sazerat des Rochilles pour redresser la limite du cimetière.
La construction de la nouvelle gendarmerie et du centre de secours va se faire pendant l’année 1971 et le samedi 17 juin 1972 à 11 heures régnait une animation inhabituelle Rue Gambetta. Monsieur Olivier PHILIP, Préfet de Région, avait accepté de venir inaugurer les nouveau immeubles récemment mis en service. De nombreuses personnalités étaient présentes : M. LAUCOURNET, Sénateur, Le Dr. BOUTARD, Député de la circonscription, M. RABAUD, Conseiller General, les Maires du Canton, le Colonel VIRY, Commandant le Groupement de Gendarmerie de la Haute-Vienne, le Commandent PELAPRAT, le Colonel CONSTANT, ancien Inspecteur Départemental des Services d’Incendie, M. JALOUX, Architecte et ses proches collaborateurs, tous les Ingénieures, Techniciens et Entrepreneurs ayant travaillé à la construction des immeubles et de leurs abords, les Présidents des Sociétés Locales, les représentants du Crédit Agricole, de l’Administration des Impôts, des P.T.T. etc… les Conseillers Municipaux, le Maire, René REBIERE et le Corps des Sapeurs-Pompiers de NEXON.
Après avoir coupé le ruban tricolore tendu à l’entrée des locaux de service de la nouvelle Gendarmerie, Monsieur Le Préfet accompagné de quelques personnalités visitait le rez de chaussée très fonctionnel, un appartement, les cours de service et enfin le garage du Service Incendie. Un Vin d’Honneur regroupait tous les invités à la Mairie.
Le Maire remerciait les personnes présentes, rappelait les motifs de la création de cet ensemble, le montant des travaux soit 675 000 Frs ( soit 713 000 € en 2020) pour la Gendarmerie et 210 000 Frs (220 000 € en 2020) pour les garages, ces derniers étant subventionnes à concurrence de 34 000 Frs, rappeler les services rendus par les Gendarmes et les Sapeurs-Pompiers….
Le Colonel VIRY devait dire à son tour sa satisfaction de compter a NEXON une caserne neuve fonctionnelle et dotée de logements confortables et le Colonel CONSTANT pour sa part se félicitait de voir le Corps de Sapeurs-Pompiers doté de garages importants et bien situes. Enfin, M. Le Préfet a dit tout le bien qu’il pensait de ces réalisations et a rappelé les projets d’investissements en cours d’étude sans pouvoir annoncer le financement des travaux des écoles qui étaient pourtant à l’origine de la nouvelle gendarmerie. (Source Bulletin Municipal n° 74 Juin-Juillet 1972).
Dès 2006, à peine 35 ans après l’inauguration de la caserne, la construction d’une nouvelle est envisagée. Mais dans un communique publié dans le Bulletin Municipal n°219 du 4e trimestre 2007, Mme JAMAIN, maire, annonçait la renonciation à ce projet car le cout aurait été trop élevé pour la commune.
Cependant le projet d’une nouvelle gendarmerie n’est pas enterré. En effet construite sur des plans qui ont plus de 40 ans la gendarmerie ne correspond plus aux besoins des gendarmes. Les exigences de confort sont celles de tous leurs concitoyens aussi bien en therme de confort, thermique et acoustique, que d’environnement, d’économie d’énergie…
Des échanges ont eu lieu avec le commandement de la gendarmerie de la Haute-Vienne et le projet pourrait voir le jour dans les années 2022-2023…
Le Rapport annuel de l’Observatoire de la sécurité des moyens de paiement 2019 révèle que le chèque est le moyen de paiement le plus fraudé en France et cette fraude s’élevait à 539 millions d’euros en 2019. Si la somme est peu impressionner elle ne représente que un euro pour 1 510 euros de paiement. Parmi les moyens de la fraude il y a le vol de chéquiers, la falsification, la contrefaçon…
Au XIXe siècle les chèques n’existaient pas et les escrocs créent de faux billets à ordre à leur nom. C’est ce qu’ont fait deux individus en fabriquant un faux billet au nom du baron Armand de NEXON reconnaissant leur devoir 8 000 francs pour l’un et 7 000 pour l’autre. On peut estimer que le franc de 1860 vaut environ 2 euros ce sont donc de coquettes sommes que les deux lascars pensaient soutirer au baron.
Ces deux affaires, au delà du fait qu’elle mettent en scène le baron de Nexon, montrent qu’à toutes les époques il y a des escrocs et que la seule solution pour mettre en échec leurs tentatives est la vigilance. Notez qu’à une époque ou il n’y a pas le téléphone M. de Nexon qui était à Paris fut prévenu, rentra à Limoges pour constater que le document était un faux et que sa signature avait été imitée. On notera la sévérité des condamnations avec de la prison ferme pour des sommes qui varient autours de 15 000 euros actuels et également la manière dont les journaux rendent compte des procès et aiment citer les plaidoiries grandiloquentes des avocats.
I- Première affaire
COUR D’ASSISES DE LA HAUTE-VIENNE.
PRÉSIDENCE DE M. DE LAMIRANDE.
Audience du 24 mai.
FAUX EN ÉCRITURE PRIVÉE. — CIRCONSTANCES ATTÉNUANTES. — CONDAMNATION. —
Le 25 juin 1860, un individu, disant se nommer COMBROUZE et être domicilié à Saint-Hilaire-Lastours, se présenta chez M. COSTE, épicier et escompteur à Limoges, et demanda à faire escompter un billet de 8 000 fr., signé par M. de NEXON, daté du jour même et payable le 25 septembre suivant. M. COSTE lui remit en échange 7 880 fr., dont 1 000 fr. en billets de banque de 100 fr., et le surplus en argent.
Le billet fut passé à la Banque de France et protesté à l’échéance. M. de NEXON, alors à Paris, en fut prévenu, se rendit à Limoges, examina le billet et déclara qu’il était faux ; qu’il était revêtu d’une signature imitant assez habilement la sienne, mais en différant par quelques points très sensibles pour lui.
Les recherches faites par la justice, sur la plainte de M. COSTE, étaient restées infructueuses, lorsque, le 21 mars dernier, M. COSTE fils se trouvant dans son magasin, crut reconnaître dans un palefrenier du haras de Pompadour qui montait l’allée du Pont-Neuf, le négociateur de la fausse valeur de 8 000 fr.
Cet homme fut arrêté, et, tout en protestant énergiquement de son innocence, déclara se nommer FALAISE (Léonard), être palefrenier à Pompadour, et attaché depuis 1853 à la station de Nexon.
Les preuves les plus accablantes ont été réunies contre FALAISE ; on a retrouvé notamment chez lui une somme de 6 010 fr., dont deux rouleaux de 1 000 fr. encore pliés dans les papiers qui les enveloppaient au moment où ils lui avaient été remis par M. COSTE. Néanmoins, il a persisté jusqu’au bout dans un système de dénégation impossible à soutenir.
FALAISE avait d’ailleurs les meilleurs antécédents. Il jouissait de l’estime de tous ceux qui l’entouraient, et M. de NEXON avait en lui la confiance la plus absolue.
M. de LA MARSONNIERE, premier avocat général, a soutenu l’accusation avec une énergie remarquable. Il a insisté surtout sur les dénégations absolues de l’accusé qui, en excluant toute idée de repentir, aggravaient encore la faute commise.
M. de LA MARSONNIERE, que nous entendions pour la première fois, est un orateur remarquable de cour d’assises. Un charme singulier s’attache à sa parole abondante et facile, à son geste sobre et modéré. Une grande force de pensée parée d’une rare élégance de style, beaucoup de simplicité dans l’exposé des faits, dans la discussion des preuves et même dans la péroraison, donnent à ses plaidoiries de la puissance et de la séduction. C’est une diction toujours égale et soutenue, sans monotonie ; c’est une force calme et tranquille. Pas de passion, pas d’emportement, mais aussi pas de faiblesse, ni même de froideur. C’est un type du genre tempéré.
Me Othon PECONNET avait été chargé de la défense de Falaise. Il l’a présentée avec une habileté et une éloquence qu’il était tout à fait impossible de prévoir dans une cause d’une extrême pauvreté et où tous les faits étaient de la dernière évidence. Il a raconté d’abord la vie de FALAISE, jusque-là pure de tout reproche, de tout soupçon ; puis, arrivant à ces dénégations obstinées de l’accusé : Loin de me disposer à la sévérité, s’est-il écrié, elles me forceraient, si j’étais juge, à l’indulgence ; elles sont comme un dernier hommage rendu par FALAISE à sa vie passée. Deux fois il s’est levé, dans cette enceinte, pour commencer un aveu, et deux fois il s’est rassis vaincu par la honte ; c’est que son passé se dressait devant lui, ce passé irréprochable que vous connaissez ; c’est qu’il voyait autour de lui ces témoins dont il avait su mériter l’estime, et qui, aujourd’hui encore, peuvent à peine croire au crime qu’il a commis ; et, poussé par une dernière pudeur, il n’a osé avouer son infamie en face de ce passé, en présence de ces témoins. Ce n’est donc pas de l’obstination, c’est de la faiblesse que je trouve dans ses dénégations, et le sentiment qui les dicte, loin d’aggraver son crime, m’impose une sorte de respect et diminue, à mes yeux, sa culpabilité.
Grâce à cette plaidoirie, dont nous ne pourrions malheureusement donner qu’une idée bien imparfaite, l’accusé a obtenu du jury le bénéfice des circonstances atténuantes. Il a été condamné à cinq ans de prison.
Le Courrier du Centre 31 mai 1861
Le Courrier du centre 31 mai 1861
II- Seconde affaire
De la lecture de l’acte d’accusation contre le sieur Pierre BUISSON, cultivateur, âgé de 21 ans, natif de Beyrand, commune de Flavignac, résulte ce qui suit :
Le 15 juin 1862, un individu se présentait, à six heures environ du matin, au domicile de MM. LAMY, banquier à Limoges. Il insistait vainement pour voir M. Edouard LAMY, et il revenait à huit heures. Il fut alors reçu par M. Octave LAMY, auquel il présenta, pour le faire escompter, un billet de 7 000 francs portant la signature « baron Armand de NEXON » et souscrit à l’ordre d’un sieur Jacques BUISSON.
C’était évidemment un billet faux. Sur l’observation qu’en fit M. LAMY, le porteur protesta énergiquement, disant qu’il était Jacques BUISSON et que c’était à lui-même que le billet avait été souscrit. Cependant, cet individu se retira, laissant le billet dans les mains de M. LAMY.
Ce fait se répandit bientôt el une instruction fut commencée. Elle établit qu’un individu, dont le signalement se rapportait exactement à celui du porteur du billet, était allé le malin dans une auberge de la rue du Saint-Esprit, et qu’il avait demandé s’il y avait des habitants de Nexon. Il était probable que le prétendu Jacques BUISSON habitait Nexon ou les environs.
Dirigées dans ce sens, les investigations de la justice amenèrent la constatation de diverses circonstances qui fixèrent les soupçons sur le nommé Pierre BUISSON, demeurant chez son père au village de Beyrand, commune de Flavignac.
Pierre BUISSON était resté quelque temps à l’école des frères établie à Nexon. Il s’y était trouvé avec les enfants de M. de NEXON, et il avait pu savoir le prénom de leur père. Il avait, à diverses reprises, manifesté le désir d’apprendre à faire un billet à ordre. Il lui avait été donné ou vendu un manuel dans lequel il y avait des modèles de billets. Sa moralité était du reste très mauvaise. Il avait, a une certaine époque, dissipé une somme de 80 francs que son père lui avait remise pour le directeur de l’école. On savait aussi qu’il maltraitait ses parents et qu’il voulait les quitter.
Il fut arrêté le 1er juillet au village de Beyrand. Interrogé sur l’emploi de son temps, le 15 juin, il a déclaré qu’il avait passé la journée à la frairie de Burgnac, et il a nié être allé ce jour à Limoges ; mais il a dit qu’il y avait fait, dans le courant du mois de juin, deux voyages : le premier vers le 8, et le second le 21.
Le 15 juin était un dimanche, il y avait à Limoges une grande fête religieuse. Cette circonstance a permis aux témoins de préciser leurs souvenirs, et trois, surtout, ont déclaré très nettement avoir vu le 15 juin Buisson à Limoges. A six heures du matin, il a demandé à une servante d’auberge l’adresse de M. LAMY, banquier. Vers onze heures, il était chez une femme qui préparait une couronne pour la procession. Il voulait parler à son mari, et elle lui a dit qu’il assistait à la cérémonie religieuse. Le domestique de cette femme était alors avec elle, et il se rappelle la conversation qui a été tenue.
BUISSON a été vu, il est vrai, à Burgnac, mais un seul témoin indique l’heure où il l’a rencontré : il était cinq heures. Or, BUISSON a pu parfaitement passer toute la matinée à Limoges et être arrivé à cinq heures à Burgnac.
Il nie avoir jamais eu aucun manuel en sa possession. Il est démenti par un témoin, et le billet est la reproduction littérale d’un des modèles du manuel. Parmi les papiers saisis dans sa chambre, on a trouvé une partie de la feuille sur laquelle le billet a été écrit. Enfin, un expert a vérifié l’écriture de BUISSON, et il déclare que le billet est son œuvre. Il ne peut donc y avoir aucune incertitude sur la culpabilité de BUISSON.
En conséquence, etc.
M. DELTHEIL occupe le siège du ministère public et soutient l’accusation.
La défense est présentée par Me NINARD.
Déclaré coupable des faits qui lui sont imputés, l’accusé obtient néanmoins des circonstances atténuantes. Il est condamné à un an d’emprisonnement.