Andrée GIBAUD est née le 5 mars 1914 à Nexon. Son père Amédée GIBAUD était platrier à Valette et son épouse, Louise RAGOT, était sans profession. Amédée GIBAUD était né le 2 juin 1884, à La Meyze, et son épouse Louise était née le 5 janvier 1889, elle aussi à La Meyze. Ils s’étaient mariés le 28 octobre 1911 à La Meyze. Au recensement de 1901, Amédée GIBAUD qui avait 16 ans a été recensé à Nexon ou il était apprenti platrier chez Auguste VIACROZE, rue du Nord.
La jeune Andrée a du aller à l’école à Nexon et, bonne élève, elle a été reçue au brevet élémentaire en juin 1930 à Limoges. En septembre 1932 elle entre à l’Ecole normale d’institutrices de Limoges et obtient son brevet supérieur en juin 1935 et son certificat d’aptitude professionnelle en novembre 1935.
Andrée Anna Gibaud est notée 13/20 par la Directrice de l’Ecole normale qui indique « Elle a des qualités de douceur, d’amabilité et d’éducation. Elle devra faire une institutrice consciencieuse ». Ces qualités sont celles que ces élèves qui ont échappés au massacre signaleront lorsqu’ils parleront d’elle.
En septembre 1935, elle est à nommée pour un remplacement à l’école de Beaune-les Mines, puis le 1er octobre 1935, à Couzeix pour trois semaines. Ensuite elle va au Palais où elle restera jusqu’en août 1938. Et c’est le 3 octobre 1939 qu’elle est nommée directrice adjointe à Oradour-sur-Glane.
Le 2 juin 1936 à Limoges, elle épouse Jean BINET, agent technique à l’intendance à Limoges.
Il était né le 15 novembre 1910 à Pontgibaud (Puy-de-Dôme), fils de Victor BINET, brigadier de gendarmerie à cheval, et de Marie Lucie MOUTON, son épouse, sans profession.
Le 13 avril 1937, à Limoges, nait leur fils, Jean Pierre.
Andrée BINET à l’école de filles d’Oradour sur Glane
Le 3 octobre 1939, Andrée BINET est nommée directrice adjointe à Oradour-sur-Glane. Depuis le 6 août 1936 le Front populaire a adopté la loi sur l’enseignement primaire présentée par le ministre de l’Education nationale Jean Zay. Elle prolonge la scolarité obligatoire de 13 à 14 ans. Les écoles d’Oradour doivent s’organiser pour accueillir plus d’élèves et surtout plus agés et ce jusqu’au passage du Certificat d’études primaires.
Le 1er septembre 1940 Andrée BINET est nommée directrice de l’école de filles qui compte 3 classes et accueille 108 élèves, soit 36 élèves par classe en moyenne.
Le 19 décembre 1941, l’inspecteur primaire de Rochechouart inspecte sa classe et visite le logement mis à sa disposition.
Elle est logée dans un appartement de « 4 pièces + cabinet à toilette ». L’inspecteur précise que contrairement à d’autres communes, la directrice n’assure pas la fonction de secrétaire de mairie. Puis l’inspecteur s’attache à comprendre Andrée GIBAUD qui n’a alors que 26 ans. Son mari travaille à Limoges et ils ont un fils de 3 ans 1/2, Jean-Pierre, qui vit à Oradour.
Concernant son enseignement il note que la préparation est « régulière et sérieuse. Fiches particulières à chaque enseignement. Tout est prévu, choisi, préparé d’une façon intelligente ». Concernant sa méthode d’enseignement, l’inspecteur écrit : « la maîtresse avec raison rattache ses observations à un nombre limité de points ; plan, construction sérieuse, expressions incorrectes, fautes d’orthographe. Mais il faut éviter de laisser les élèves passifs, la correction collective doit être vivante, tous les enfants doivent y participer. Ce n ‘est pas suffisant de lire les passages contenant les fautes principales, il faut écrire au tableau, soit un alinéa, soit une phrase à mettre d’aplomb soit une proposition lourde obscure. Les élèves sont entraînées à corriger, en marge, les fautes signalées».
L’inspecteur apprécie que les jeunes élèves de Mme Binet « lisent bien, avec expression », qu’elles récitent leur texte d’une « diction lente, accentuée », enfin qu’elles aient « la voix juste et respectent les nuances » dans les exercices de chant auxquels il assiste.
L’inspecteur conclue son rapport en saluant en Mme Binet une institutrice directrice d’école, qui « travaille avec méthode et ordre ; Les résultats obtenus sont satisfaisants».
Le 10 juin 1944, jour du drame.
En ces jours d’anniversaire du 80ème anniversaire du drame je ne reprendrai pas la chronologie des événements. Dans un petit livre de 36 pages, Robert HEBRAS, le dernier survivant du massacre décédé le 11 février 2023, faisait revrire le drame heure par heure. (10 juin 1944 Oradour su Glane- le drame heure par heure par Robert HEBRAS. Les Productions du Pertuis 2001). ce qui est certain c’est que lorsqu’a vers les premiers soldats pénétrèrent dans le bourg, presque personne n’a eu peur, pensant qu’il s’agissait d’un simple controle d’idendité.A 14h30 les soldats ont demandés aux institeurs de faire sortir les enfants et de les amener sur le champ de foire. A l’exception du jeune Roger GODFRIN, personne ne s’aoffait; Mais lui qui avait quitté son village de Charly chassé par les Allemands ne leur faisait pas confiance retenant les paroles de sa mère « Quand tu vois les boches, tu fuis. » C’est ce qu’il a fait et il fut le seul rescappé parmi tous les élèves.
Andrée BINET, la directrice de l’école des filles n’est pas à son poste. Elle était en arret pour maladie dépuis le début du mois de mai. Son arret se terminait ce soir là et elle devait reprendre ses fonctions le lundi 12 juin. Elle était remplacée par une jeune institutrice agée de 23 ans, Odette COUTY. Elle logeait à l’Hôtel Milord ou elle avit laissé sa bicyclette pour regagner Limoges en fin de journée, son remplacement terminé.
Sa remplaçante suit les consignes des soldats et fait sortir les enfants de sa classe. Les bérets restent accochés aux portemanteaux, les sacs sont abandonnés sur le plancher. Arrivés sur le champ de foire les enfants et les femmes qui avaient été séparées des hommes furent réunis. Ils prirent ensuite la route pour aller vers l’église.
Ce samedi matin, Andrée BINET ne se sent pas bien, elle reste au lit. Sa mère Louise RAGOT, épouse Gibaud, était venue la voir. Son fils Jean Pierre qui avait 7 ans était à l’école. Des soldats l’ont faite lever et c’est en robe de chambre qu’elle a accompagné ses élèves vers l’église.
Marguerite ROUFFANCHE, l’unique survivante de l’église, raconte lors du procès de Bordeaux : « Nous avons été conduits à l’église, toujours avec l’escorte de la mitraillette et là, nous avons été enfermés. Après une longue attente, ils ont apporté une caisse qu’ils ont placée sur deux chaises devant la sainte table. De cette caisse se dégageaient des cordons blancs; je ne peux savoir quel engin c’était et au bout de peu de temps, la caisse a éclaté d’un coup très sourd, et il s’est élevé une fumée qui nous a étouffés et on ne voyait plus dans l’église.
A ce moment-là, les gens sont montés pêle-mêle les uns sur les autres, il y avait des familles entières, les enfants des écoles… ». Elle poursuit «…après l’explosion, quand la fumée a été dissipée, les soldats SS sont rentrés dans l’église; à ce moment ils ont mitraillé comme ceci (geste). Après ils ont apporté des fagots et de la paille et ils ont mis le feu, et c’est à ce moment-là que je suis sortie…(…) Je suis monté sur un escabeau, et je me suis lancée par la fenêtre».
Dans l’église, les enfants et leurs institutrices sont restés mêlés les uns aux autres dans un amas de cendres. Jean Pierre devait etre dans les bras de sa mère. Peut-être qu’également Louise RAGOT s’était rapprochée de sa fille et trois générations d’une même famille ont brulé dans cette église. Horible fin pour ces femmes qui furent tuées puis brulées avec leurs enfants.
Dépot central des archives de la justice militaire (DCAJM) cote 1953_02000 001_01_04_00226 et 00227
Jean BINET fut mitraillé puis brûlé dans l’une des six granges dans lesquelles les hommes furent massacrés.