M. et Mme CAUQUIL ayant acheté le garage attenant à l’ancien café de la poste pour le transformer en cabinet d’infirmière commencèrent à y réaliser des travaux au mois de novembre 2021. Après quelques coups de pioche pour refaire le sol des ossements apparaissent. M. CAUQUIL pense qu’il s’agit d’animaux qui auraient été enterrés par les vétérinaires. Mais l’œil d’une infirmière ne pouvait pas confondre des os d’animaux avec des os humains. Quand un fémur fut déterré il ne pouvait plus y avoir de doutes , il s’agissait bien d’ossements humains.
Le reflexe de Mme CAUQUIL a été de prévenir la gendarmerie de cette découverte. Les recherches ont consisté à savoir s’il n’y avait pas une disparition, un meurtre non élucidé à Nexon dans le passé.
Les gendarmes ont immédiatement déposés des scellés sur la porte de local interdisant toute entrée jusqu’à l’élucidation de l’origine des ces ossements.
Ayant appris qu’il y avait eu un ancien cimetière dans cette zone, l’adjudant chargé de l’enquête à la gendarmerie de Saint Yrieix m’a contacté afin que je lui communique les documents relatifs à ce cimetière.
Après quelques semaines de recherches la gendarmerie a conclu que les ossements provenaient bien de l’ancien cimetière. Les scellés ont été retirés et Mme CAUQUIL a pu continuer les travaux de création de son cabinet de soins infirmiers.
Où se trouvait l’ancien cimetière ?
En 1651, les inhumations se faisaient à Nexon dans deux cimetières à la fois. Le plus ancien entourait en partie l’église et forme aujourd’hui la place qui s’étend jusqu’au portail du château. Le second, plus récent, occupait l’emplacement de l’ancien Champ de Foire, aujourd’hui place de la République, et fut utilisé jusqu’à la fin de 1817.
Le cimetière qui autours de l’église fut abandonné vers 1680 et il n’y eu alors qu’un seul cimetière, plus grand que le premier. Son emplacement était bizarrement choisi, sur un sol rocheux en forte déclivité ce qui facilitait le ravinement des eaux pluviales. Il fut assez vite entouré d’habitations si bien qu’à la fin du XVIIIe siècle il se trouvait à peu près au centre du bourg. Les registres municipaux de cette époque relatent à plusieurs reprises les inconvénients résultant de la présence de ce lieu de sépulture sur ce terrain et en cet endroit.
Ils signalent que les tombes se trouvaient presque à fleur de terre et que les chiens et les pourceaux y déterraient parfois les cadavres, « quelques précautions que l’on ait prises ». Il était cependant clôturé « de murs d’une hauteur suffisante » et deux portes y donnaient accès, l’une dite « supérieure » et l’autre « inférieure ». De gros noyers l’ombrageaient de leurs rameaux. A l’intérieur se trouvait une Chapelle dédiée à Saint Léonard dont l’existence nous est révélée par un acte de 1652 : « le troisième d’avril mil six cent cinquante deux est decede en la Communion de nostre mère la Ste Esglise Jacques marginier âge de cinquante ans et fust ensevely dans nostre Cymetiére proche la Chapelle de St-Léonard confefsé et communié par moi soubsigné. F. Tarade pbre vicaire a Nexon ».
La question de son transfert a été posée en 1807, sous le Premier Empire. Le 20 octobre 1807, lors d’une séance extraordinaire, le Conseil fut saisi de plusieurs plaintes de particuliers et examina la question du déplacement du cimetière. Il délibéra sur les questions suivantes :
1°Acceptation de la proposition faite par Gabriel THOMAS, adjoint, de fournir un local en ce quoi on lui laisse une petite portion de cimetière à côté de son jardin ?
2°Laissera-t-on pour une place de foirail l’emplacement de l’ancien cimetière, déduction faite de l’échange THOMAS ?
3°Quel est l’emplacement le moins coûteux et en même temps le plus commode pour un nouveau cimetière afin d’atteindre le but proposé ?
4°Le terrain proposé par TARRADE remplit il le vœu de la 3éme question ?
5°Quels sont les moyens à prendre pour trouver les fonds nécessaires aux fins de la clôture du nouveau cimetière ?
Les premières, secondes et quatrièmes questions ont été adoptées à l’unanimité. Quant à la proposition TARRADE, après une longue discussion, l’échange est accepté avec une délimitation très précise. Quant à la 5éme question (financement) le Conseil décide de vendre les noyers se trouvant dans le cimetière actuel et dans le jardin de la cure et, pour le surplus, imposer tous les contribuables au marc le franc. Le surplus de l’ancien cimetière serait transformé en foirail.
Le 15 décembre 1807, le Conseil délibère à nouveau sur le changement du cimetière et fait connaître à Monsieur le Préfet : 1° que l’ancien cimetière se trouvant placé presque au milieu du bourg entouré d’ailleurs des maisons d’habitation pourrait dans les chaleurs excessives corrompre l’air et occasionner une épidémie ? 2° qu’il est incommode pour les habitants du bourg en ce que l’espace qu’il renferme gène considérablement leur sortie ce qui fait qu’on a vu de temps en temps quelques cadavres exhumés par des cochons, quelques précautions qu’on ait pu prendre; 3° que les particuliers les plus près ayant senti pendant l’été quelques odeurs infectes, on a entendu de temps en temps des plaintes; 4° que sa position est nettement contraire à la loi; 5° que le nouveau local choisi par la commune doit ne présenter aucun des inconvénients, ne peut en aucune façon nuire à la salubrité de l’air, étant placé à 112 mètres de la maison la plus près ; 6° qu’à la vérité ce nouveau local présenterait une distance un peu plus longue pour certains villages, mais que cet inconvénient, si cela en est un, ne saurait être mis en parallèle avec les dangers qui pourraient résulter de l’insalubrité de l’air si le changement réclamé par le Conseil n’avait pas lieu.
Le terrain proposé par TARRADE était éloigné du bourg mais il fallu plusieurs années de discussions avant que le projet avance.
Le 27 mai 1812 le Maire désigne le sieur Antoine GUYOT du village du Brouillet, expert de la commune pour procéder à la délimitation de nouveau cimetière, à l’estimation du terrain et au coût du mur de clôture. Il nomme les sieurs François LIMOUSIN et François TARRADE officier de santé pour voir si la parcelle acquise peut bien servir de cimetière et s’il se trouve bien à la distance requise et ne cause aucun inconvénient aux voisins.
Enfin le 10 janvier 1813 le Conseil Municipal valide toutes les opérations relatives au nouveau cimetière et décide son aménagement. Il en demande l’autorisation au gouvernement.
Par un décret du 11 novembre 1813, Napoléon autorise le maire de Nexon à échanger avec le sieur TARRADE le cimetière actuel d’une superficie de cinq ares soixante centiares estimé à trois cent francs contre un terrain de cinquante ares et cinquante centiares estimé à quatre cent francs. Le décret autorise la commune à augmenter les impôts pour couvrir les frais et elle ne pourra commencer les travaux que lorsque le devis sera approuvé par le ministre de l’Intérieur.
Afin de réaliser le transfert dans les meilleurs délais, la commune a fait réaliser un devis par Laurent GUILLAT, maitre maçon à Bosmarèche, commune de Nexon. Le montant s’élève à 1 222 francs. La délibération du Conseil de Fabrique et du maire a été enregistrée à la mairie le 8 novembre 1814 et approuvée par le préfet de la Haute-Vienne le 13 janvier 1815.
Dans cette délibération le conseil constate que le devis estimatif et descriptif de la clôture du nouveau cimetière coûtera 1 222 francs mais que la vente des noyers de l’ancien cimetière n’a produit qu’une somme de 480 francs. Il demande à l’Empereur de prendre en charge la différence, la commune étant déjà trop imposée.
Le 15 Mai 1818 le Conseil décide la restitution des pierres de taille provenant de l’ancien cimetière, pierres que diverses personnes se sont appropriées. Il autorise GIZARDIN à faire toutes poursuites contre les délinquants.
Sur le plan cadastral de 1823 la rue Victor Hugo n’existe pas encore, je l’ai tracée au Stabilo orange. La parcelle n° 11est notée « du cimetière » et est une terre, la n°12 est notée place « aux habitants propriétaires de la commune » ainsi que la n° 13 qui est « la cure » et la n° 14 qui est la petite chapelle qui se trouvait en haut du cimetière.
Ainsi il arrive que le passé se rappelle à nous.. C’est une belle occasion pour le faire revivre.