Il n’y a pas beaucoup d’écrits sur cette chapelle. Pourtant, bien qu’elle soit relativement ancienne elle n’est pas citée dans le Dictionnaire Historique et Géographique de la Haute-Vienne de Jean LECLER. Pour écrire ce chapitre je vais largement utiliser le texte de Philippe PAUZET publié dans le bulletin municipal de Nexon n° 175 de décembre 1996 .
La Chapelle Notre-Dame des Garennes a été construite au 13ème siècle sur l’emplacement d’un oratoire qui existait à cet endroit. L’existence d’un oratoire à cet emplacement est attestée par « le Pouillé de Nadaud ». Selon la tradition locale la cette chapelle aurait été affiliée à Notre-Dame des Neiges mais c’est le nom de chapelle des Garennes qui allait s’imposer, la chapelle étant alors située en dehors du bourg.
L’oratoire aurait été un ex-voto d’un personnage local, comme le sont la chapelle Notre-Dame de Sauvagnac, celle d’Arliquet, et plus près de nous, Notre-Dame des Places dont l’édification lui serait contemporaine, car « elle portait le même cachet de date et de construction ».
La chapelle est construite à la fin du 17ème siècle dans une forme proche de celle qu’elle a aujourd’hui. En effet un contrat établi « dans la sacristie de l’église de Nexon le 3 novembre 1698, entre Louis Téxerot, écuyer seigneur de la Sélive, Messire François (Féline) Juge, bachelier en théologie, prêtre curé de Nexon, et M. Simon Sazerat, notaire du dit bourg et syndic et fabricien de la dite église »; contrat accordant, sur sa demande, au seigneur de la Sélive et aux siens, un banc de 7 pieds de long dans l’église. En contrepartie, « le dit sgr offre 100 livres pour la décoration du grand autel de l’église et 10 livres pour être employées à faire couvrir la chapelle de Notre-Dame, nouvellement construite à l’entrée du bourg de Nexon, du côté du château de la Seylives ». Ce contrat a été reçu et approuvé le 20 novembre 1698 par l’évêque de Limoges, François de Carbonel de Lénisy.
Au moment de la construction du chemin de fer de Limoges à Périgueux, les salariés se mirent sous le patronage de Notre-Dame des Garennes. Mais l’état de la chapelle se dégradait avec le temps. Aussi, en 1871, constatant qu’il ne pouvait plus y célébrer les offices, M. Pradeau, curé de Nexon, décida d’y réaliser des travaux. Mais la période n’y était pas favorable. La défaite de Sedan le 1er septembre 1870 qui entraina dans sa foulée la chute de l’Empire a crée une période difficile, peu propice aux rénovations des édifices religieux. Cette période a duré jusqu’au 30 janvier 1875, jour ou la 3ème République fut enfin proclamée. Il faut dire aussi que Laurent Pradeau, a peine avait-il lancé l’idée d’une rénovation qu’il a quitté Nexon ou il était prêtre depuis 27 ans.
L’abbé Pierre Molinié lui a succédé le 10 février 1872. Dès son arrivé les paroissiens exercèrent sur lui une amicale pression pour qu’il agisse en faveur de la chapelle. Il créa aussitôt un comité composé des notables de la paroisse, lequel ouvrit une souscription. Mais en même temps l’abbé Molinié présidait le comité cantonal de soutien pour l’achèvement de la cathédrale de Limoges.
« On organisa une loterie. La commune, la fabrique de Nexon, la Compagnie des chemins de fer d’Orléans, le Pasteur, les principales familles souscrivirent ». L’édifice – qualifié à l’époque de « modeste et gracieux » – s’éleva sous la direction de M. Pinard, architecte du département de la Haute-Vienne, à l’emplacement actuel, face au couvent des frères du Sacré-Cœur. En 1875, le gros-œuvre était terminé mais le comité, à bout de ressources, dut de nouveau faire appel à la générosité publique pour effectuer l’ornementation. La chapelle put ainsi recevoir la bénédiction de l’évêque de Limoges, Mgr Duquesnay, le 1er juillet 1875.
Quatre cartes postales ont été éditées avant 1914 . La plus ancienne date d’avant l’installation de l’électricité dans le quartier. On le constate facilement car il n’y aucun poteau ni fil électrique.
Sur les trois cartes suivantes il y a un peu plus d’animation. On remarque sur celles ci les poteaux et les fils électriques. Sur la première, postée en février 1012, deux hommes se croisent. L’un porte la blouse (blauda) que les paysans mettaient pour sortir et aller à la foire ou au marché.
Au fond, on voit un tas de grumes de la scierie Laspougeas maintenant occupée par l’office notarial et le Crédit Agricole.
Sur la suivante des enfants sont venus prendre la pose. Ce sont sans doute des élèves de l’école religieuse qui est en face.
Sur la troisième 5 soldats ont revêtu leurs capotes. C’est l’hiver, les arbres n’ont plus de feuilles. On doit être au début de la guerre et les soldats ont traversé la rue pour être sur la photo. Leur unité, la 15e batterie du 68e régiment d’artillerie a pied stationnait dans l’école religieuse comme on le voit sur la carte postale suivante.
Sur ces différents clichés la chapelle a l’air en bon état. Mais pendant l’été 1935, un violent orage coucha sur la toiture les sapins qui se trouvaient à l’entrée du cimetière. Celle-ci fut défoncée et, la pluie ayant provoqué des dégâts à l’intérieur, une souscription fut ouverte pour la rénovation de la chapelle. En effet celle-ci étant un bien communal la municipalité n’avait pas le budget suffisant pour entreprendre les travaux. Les nexonnais collectèrent près de 5 000 francs qu’ils remirent à la municipalité. Considérant l’effort fait par ces nombreux habitants, le Conseil Municipal dans sa délibération du 23 aout 1936 accepta la somme de 5 000 francs et la versa à la Caisse du receveur municipal et décida de compléter la dépense en prélevant les fonds sur le budget de la commune.
Le devis dressé le 22 septembre 1936 s’élevait à 7 500 francs.
On peut être surpris par l’exigence sur la qualité des matériaux et de la réalisation. Il serait difficile d’en trouver comme celui-ci maintenant…
La chapelle sur une carte postale de l’immédiat après guerre n’a pas changé d’allure. Le changement qui saute le plus aux yeux est la grille à l’extérieur qui repose sur un petit muret.
L’intérieur est très lumineux et le mobilier modeste.
Une curiosité cependant : la statue au dessus de l’autel est une vierge à l’enfant qui dans sa main droite tient une quenouille. Jusqu’au 12e siècle on représentait souvent la vierge filant le voile pourpre pour le temple puis petit a petit la quenouille n’est devenu qu’un instrument.
La vierge des Garennes ressemble fortement à celle, plus haut, que j’ai trouvé à vendre en salle des ventes à Saint de Luz en février 2021. Elle est en chêne sculpté en Lorraine, fin du XVIIe siècle et haute de 63 cm. La vierge de Nexon est plus grande, 110 cm et elle est ainsi décrite dans sa fiche d’inscription « Statue de Vierge à l’enfant dite Notre-Dame des Garennes, du 17e ou 18e siècle, mutilée probablement à la Révolution, et reconstituée. «
On en trouve quelques unes dans la région, à Marval, Sauviat sur Vige, Bellac mais elles n’ont pas d’objet dans la main.
Par un beau soleil et sur fond de ciel bleu cette petite chapelle dégage une chaleur et une luminosité qui ont sans doute attiré l’homme qui s’est installé sur le parvis.