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Le 17 aout 1944, 28 jeunes maquisards sont massacrés par les soldats allemands entre Moissac et Jourgnac. Les 5 jeunes massacrés à le Chaume verte sur la commune de Jourgnac ont reçu un vibrant hommage à Nexon et l’un d’eux y a été inhumé.

C’est de ces cinq jeunes dont je parlerai plus particulièrement à l’occasion de l’hommage patriotique qui leur a été rendu à Nexon le 19 aout 1944 et le 18 aout 2024 à Jourgnac pour le 80ème anniversaire de ce triste évènement.

Replaçons cette journée du 17 aout 1944 dans le contexte de l’époque. Depuis le débarquement réussi du 6 juin 1944 en Normandie, le rapport des forces entre les Allemands et les Alliés a progressivement changé. Un nombre de plus en plus important de jeunes s’engagent dans la résistance. Les parachutages sont plus nombreux qui apportent à chaque fois des armes, des munitions, des postes de radio … et même de l’argent. En même temps le commandement des maquis va s’unifier. En Haute-Vienne le 25 juin 1944 Georges GUINGOUIN est nommé à la tête des maquis FTP et le 15 aout 1944 il devient chef de tous les maquisards de la Haute-Vienne sous la bannière des FFI.

Le Colonnel G. GUINGOUIN

Dès le début du mois d’août la décision est prise d’encercler la ville de Limoges. Les allemands ne contrôlent plus qu’une zone de 10 km autour d’elle. A partir du 12 août 1944 alors que les premiers signes d’un départ imminent des troupes allemandes et de leurs collaborateurs se précisaient, plusieurs maquis de la Haute-Vienne sur ordre du commandant départemental des FTP, Georges GUINGOUIN, vinrent s’établir autour de Limoges. La libération de la ville semblant proche.

Ces maquis s’installèrent à partir de la nuit du 13 au 14 août, dans les communes périphériques de Limoges, répartis en quatre secteurs : A pour l’est ; B pour le Sud avec deux bataillons de 900 hommes sous les ordres du commandant NELSON et la mission de bloquer les routes nationales 20 et 21 vers Toulouse ; C pour l’ouest avec quatre bataillons de 2050 hommes dirigés par le commandant BERNARD avec mission de contrôler la route d’Angoulême et le secteur C,  au Nord, avec trois bataillons de 1500 hommes pour contrôler les axes de Paris et Poitiers.

Les événement du 17 août 1944

Le 15 août, la 2408ème compagnie FTP placée sous les ordres du lieutenant Robert MARTY, alias Nitchevo, quitte Gorre en camion pour rejoindre Solignac, au sud de Limoges. Pendant la nuit l’un des groupes gagna le secteur du château de Plaisance sur la commune de Feytiat où il prit position.

Le 15 août 1944, au soir, une colonne d’Allemands passe au lieu-dit « Plaisance» de Moissac, commune de Feytiat, sur la route de Limoges à Saint-Yrieix. De nombreux consommateurs sont au café au moment où les  Allemands s’y arrêtent à la recherche du maquis. Les clients partent et la famille du patron, M. FAYE, est interrogée par les militaires. Devant la porte se trouve un vélo sur lequel un drapeau tricolore est peint sur le cadre. Les Allemands interrogent la famille pour savoir où se trouvent les résistants. Les allemands déploient une carte et indiquent les points où sont susceptibles de se trouver les maquisards. Mais le patron, Monsieur FAYE, affirme qu’il n’y a pas de maquis dans le coin. Les Allemands consomment, leur chef, un jeune officier S.S. entraîne ses hommes dans des chants et des danses puis ils quittent le café, sans payer leurs consommations. La famille FAYE est soulagée et pense avoir protégé les maquisards cachés dans les environs.

Deux jours plus tard, le 17 août, dans la matinée, un convoi allemand, composé de trois blindés escortés de chenillettes et d’automitrailleuses appartenant au 19ème Régiment de police SS, se dirige vers le sud en direction de Saint-Yrieix-la-Perche par la D 704.

 I -Feytiat-Solignac-Le Vigen

Des hommes de la 2408e compagnie FTP sont postés entre Feytiat et le Vigen à proximité de Bon-Abri, Plaisance et Moissaguet. Lucien MAILLARD, de son vrai nom Joseph-Louis LE POUPON, est à la tête d’un groupe de huit maquisards qui a pris position pour faire barrage aux troupes qui prendraient la route de Saint Yrieix. Ils sont chacun à son poste derrière les chênes, dans l’allée en face du château de Plaisance. Mais contrairement à l’ordre donné, lorsque le convoi allemand arrive à la hauteur de l’allée de chêne, l’un des maquisards ouvre le feu sur le dernier blindé. Le convoi stoppe, les soldats jaillissent des véhicules, ouvrent le feu. Sept maquisards sont abattus. Ils sont affreusement mutilés, ventres ouverts à la baïonnette, têtes écrasées. Tout leur sang s’est répandu sur la chaussée. Louis BUISSON, blessé, fut achevé, puis dépouillé de ses vêtements, de ses chaussures et de son portefeuille. Un seul, Louis CHAUPRADE, réussira à prendre la fuite.

Une quarantaine d’Allemands fouillent les environs, notamment le château de Monsieur de LA MOYNERIE, baïonnette au canon. Pendant ce temps un camion muni d’un drapeau blanc vient chercher les corps des victimes qui seront amenés dans une chapelle ardente installée à Boisseuil.

Une stèle érigée sur la D 704 à hauteur de Moissac comporte 6 noms. Ils ont entre 19 et 32 ans et seulement deux d’entre eux sont originaires de la Haute-Vienne.

Les six dont les noms sont gravés sur la stèle Feytiat-Plaisance :

  • BUISSON Louis, né le 31 mars 1922 à Dournazac (Haute-Vienne), cultivateur,
  • DESBORDES Jacques né le 28 avril 1922 à Angoulême (Charente),
  • DEVAUD Léon né le 25 juillet 1925 à Les Cars (Haute-Vienne), cultivateur,
  • LE POUPON Joseph né le 29 avril 1912 à Gourin (Morbihan), 32 ans, charpentier,
  • LIBOUTET Victorien né le 18 février 1923 à Mainfonds (Charente),
  • RENNER Lucien né le 3 octobre 1922 à Strasbourg (Bas-Rhin).  

Quelques centaines de mètres plus loin, au Bon Abri, de nouveaux maquisards vont être abattus. Parmi eux, Aimé PATAUD dit « Tarzan », âgé de 16 ans. Jean DELAGE qui n’était pas maquisard mais employé de la SNCF fut grièvement blessé par un éclat d’obus allemand. Transporté à l’hôpital de Limoges, il y décéda le 20 août 1944 à 23 heures. Les massacres vont se poursuivre sur la route 704 le long de laquelle ont été postés des maquisards, sans expérience militaire et dotés de simples fusils ou de mitraillettes face aux canons et aux mitrailleuses des allemands.

La stèle élevée au Mas-du-Puy commune du Vigen comporte huit noms. Le plus jeune a 16 ans et le plus âgé 31 ans.  Bien que non maquisard le nom de Jean DELAGE a été inscrit parmi les victimes. On ne trouve pas d’information sur les bases de données en ligne pour trois d’entre eux, sans doute parce qu’il y a eu des erreurs dans la transcription des noms.

Les huit noms inscrits sur la stèle de Puy Mery située sur le côté gauche de la route D 7004 en venant de Limoges dans la descente avant l’embranchement de la route menant au parc zoologie du Reynou :

  • Jacques BARRAGE 18 ans,
  • René BUGEAUD né le 30 juin 1917 à Saint-Yrieix-la-Perche (Haute-Vienne), 27 ans,
  • Jean DELAGE né le 30 janvier 1913 à Flavignac (Haute-Vienne), cantonnier SNCF, 31 ans,
  • Lucien MEILHARD,
  • Aimé PATAUD dit « Tarzan » né le 19 septembre 1928 à Chalus (Haute-Vienne), 16 ans,
  • Marcel THOMAS né le 16 novembre 1921 à Flavignac (Haute-Vienne), 22 ans, cultivateur,
  • Aimé VALADE dit « Nénou » né le 10 septembre 1925 à Bussière-Galant (Haute-Vienne), 18 ans, cultivateur,
  • Pierre CUISINIER, alias Georges, né le 25 février 1923 à Rochechouart,  21 ans.
Bulletin des Amis du musée de la résistance de Limoges n°89-2012

II- Jourgnac – La Chaume Verte

Un groupe de maquisards appartenant à la 2449ème compagnie FTPF (sous-secteur B) avait été placé en position défensive au lieu-dit La Chaume-Verte sur la commune de Jourgnac afin d’assurer la protection du poste de commandement du bataillon FTPF établi à Boissac sur la commune voisine du Vigen attenante à celle de Jourgnac.

Au cours de l’après-midi, l’unité allemande change de direction et quitte la D 704  à Saint Maurice les Brousses. Elle part vers l’Ouest et se dirige vers Jourgnac d’où elle rejoindra Séreilhac. Vers 17h30 la tête de la colonne arrive à la hauteur de La Chaume Verte, à moins d’un kilomètre de Jourgnac. Un groupe de FTP qui traversait à découvert un pré  en contre-bas de la route est surpris par cette arrivée des allemands. Ils n’ont pas le temps de se mettre à l’abris et malgré le courage de Fernand DUDOGNON qui, bien que blessé, continue à tirer avec son fusil mitrailleur jusqu’à l’épuisement de ses munitions, les cinq camarades sont tués. La colonne continue sa route et les corps restent exposés dans le pré.

Ce n’est que le soir que des paysans qui participaient à une batteuse dans le bourg de Jourgnac sont allés les chercher. Les corps étaient mutilés, les yeux crevés, les membres cassés (récit de Denise BONNET à partir de ce que son père lui a raconté). Ils ont été mis dans une charrette et conduits à l’église ou le curé, Pierre ROUGERIE les a accueillis. Les corps étaient tellement mutilés qu’il n’a pas été possible de les identifier. Pour rédiger le certificat de décès le maire les a désignés par la couleur de leurs cheveux, leur taille … et leur surnom de maquisard. Leur véritable nom a été transcrit sur le registre de l’Etat Civil après un jugement du Tribunal d’Instance de Limoges rendu le deux mai 1946.

Deux jours plus tard, malgré la proximité des troupes allemandes, un hommage patriotique fut organisé à Nexon en présence de plusieurs centaines de personnes et de contingents de maquisards. Un ordre de Mission est signé par AMAT Charles, Commandant de la 2453e Cie FTP-FFI bassée à Marval ( Monfréboeuf), en place pour la libération de Limoges. Il ordonne au soldat CHAMBON d’aller à Jourgnac en camion afin de ramener les cinq corps à Nexon pour leur inhumation.

A Nexon, les cinq cercueils sont alignés devant la mairie, à droite des escaliers. Cinq couronnes mortuaires ont  été confectionnées. Deux sont déjà dans les mains de ceux qui vont les porter, les trois autres sont encore sur la terrasse. A gauche une section de maquisards est alignée, derrière eux les enfants des écoles et les pompiers de Nexon dont on aperçoit le drapeau en bas à gauche de la photo. En face les familles et les amis. Entre les deux un camion gazogène attend que les cercueils soient chargés pour les amener au cimetière où ils seront inhumés. De l’autre côté de la route une foule nombreuse regarde.

Le cortège va se mettre en marche. Les enfants des écoles s’avancent en rang et se dirige vers le cimetière.

Le cortège avance, six maquisards sont de part et d’autre du camion qui est suivi par la section de 24 maquisards en arme. Derrière eux les pompiers de Nexon puis les les familles…Les corps furent inhumés provisoirement au cimetière de Nexon.

Le 8 septembre 1944, une nouvelle cérémonie eut lieu au cimetière de Louyat à Limoges à l’occasion du transfert des corps des deux inséparables camarades, Maurice BOISSARD et Lucien COURTIAUD.

Transfert des corps de Lucien COURTIAUD et Maurice BOISSARD à Louyat

Fernand DUDOGNON a été inhumé dans le vieux cimetière de Bussière-Galant, et Roger SAMUEL à Pageas puis transféré à la nécropole de Chasseneuil/Bonnieure.

Le Populaire 28 aout 1944

Seul Raymond LAPOUGE est resté à Nexon.

Au total les combats du 17 août entraînèrent la mort de 28 résistants FTP.

Bien que les allemands n’aient pas subis de pertes ils constatent que la résistance est solidement implantée et ils rentrent à Limoges. Dans le même temps les miliciens organisent leur départ faisant perdre à la garnison de Limoges une partie non négligeable de ses forces. Tout est prêt pour que les FFI qui encerclent la ville la fasse tomber. Elle le fera le 21 août 1944.

La stèle érrigée sur les lieux du massacre

Au début de l’année 1945 une stèle a été érigée sur les lieux du massacre, au bord du CD 11, au lieux dit la Chaume Verte, par M. REDON le maire de Jourgnac élu après la Libération. Elle a été inaugurée au printemps par le préfet Jean CHAINTRON.

Les cinq noms ne sont pas dans l’ordre alphabétique :

Fernand DUDOGNON né le 21 mars 1923 à Bussière-Galant (Haute-Vienne), 21 ans,

Maurice BOISSARD né le 30 mars 1924 à Limoges (Haute-Vienne), 20 ans, employé de banque,

Lucien COURTIAUD né le 14 février 1925 à Limoges (Haute-Vienne), 19 ans, étudiant,

Raymond LAPOUGE né le 3 mars 1910 à Angoulême (Charente), 34 ans,

Roger SAMUEL né le 29 octobre 1923 à Magnac-Laval (Haute-Vienne), 20 ans, ouvrier agricole.

Une importante commémorationa eu lieu pour les 50 ans du massacre avec la participation des familles des cinq victimes :

Pour commemorer les 80 ans de ce massacres une première cérémonie a eu lieu le 12 avril 2024. Les enfants de l’école de Jourgnac ont planté un chêne pour rapeller la mémoire du massacre.

Le chêne de la Mémoire

Le dimanche 18 aout 2024 une belle cérémonie eu lieu devant la stèle.

La plaque du « Chêne du souvenir a été dévoilée.Un hommage émouvant a été rendu par Lucien COURTIAUD, neveu qui porte leprénom de son oncle afin de perpétuer sa mémoire. Le proviseur du lycée Turgot était présent pour rappeler le sacrifice des deux amis, Lucien et Maurice, inséparables camarades étudiants dans ce lycée.

Raymond LAPOUGE le seul des cinq victimes a etre resté inhumé à Nexon

Raymond LAPOUGE avait 34 ans. Il avait 4 enfants et son épouse était enceinte d’un cinquième.

Raymond LAPOUGE

Au moment de son inhumation il n’avait pas encore été officiellement identifié. Sa reconnaissance par jugement a été transcrite sur le régistre des décès ou il était décrit par un signalement approximatif, le 24 septembre 1946.

Extrait du régistre de l’Etat Civil de la mairie de Jourgnac
Transcription du jugement du Tribunal Civil de Première Instance de Limoges

Sa tombe est demeurée longtemps abandonnée. Il semble cependant qu’une personne agée de Nexon venait assez régulièrement y déposer des fleurs.

Mais grace au travail effectué par Josette DUGOT et son époux Jean Claude, alors membres du Souvenir Français, les membres de la famille de Raymond LAPOUGE ont été retrouvés. Sa fille, née en novembre 1944, à peine trois mois après le décès de son père ne venait pas sur la tombe de son père. En effet le second mari de sa mère ne désirait pas que son épouse aille se receuillir à Nexon sur la tombe de son défunt mari.

La fille de Raymond LAPOUGE a permis que le corp de son père soit relevé et la tombe rénovée par le Secour Populaire. Au cours de cette opération la dépouille a été reconnue par la famille grace à la trace d’une ancienne fracture connue d’eux.

La tombe a été refaite et porte la cocarde du Souvenir Français

En 1994, pour les 50 ans du massacre, une cérémonie a été organisée à Nexon avec sa veuve entourée de ses enfants et petits enfants.

Mes remerciements à mon camarade Lucien COURTIAUD, Chirurgien dentiste honoraire, Colonel Honoraire qui m’a fourni de nombreux documents et aux anciens de Souvenir Français de Nexon.

Quand l’ancien cimetière se rappelle au bon souvenir des nexonnais à l’occasion de travaux …

M. et Mme CAUQUIL ayant acheté le garage attenant à l’ancien café de la poste pour le transformer en cabinet d’infirmière commencèrent à y réaliser des travaux au mois de novembre 2021. Après quelques coups de pioche pour refaire le sol des ossements apparaissent. M. CAUQUIL pense qu’il s’agit d’animaux qui auraient été enterrés par les vétérinaires. Mais l’œil d’une infirmière ne pouvait pas confondre des os d’animaux avec des os humains. Quand un fémur fut déterré il ne pouvait plus y avoir de doutes , il s’agissait bien d’ossements humains.

Le reflexe de Mme CAUQUIL a été de prévenir la gendarmerie de cette découverte. Les recherches ont consisté à savoir s’il n’y avait pas une disparition, un meurtre non élucidé à Nexon dans le passé.

Les gendarmes ont immédiatement déposés des scellés sur la porte de local interdisant toute entrée jusqu’à l’élucidation de l’origine des ces ossements.

Ayant appris qu’il y avait eu un ancien cimetière dans cette zone, l’adjudant chargé de l’enquête à la gendarmerie de Saint Yrieix m’a contacté afin que je lui communique les documents relatifs à ce cimetière.

Après quelques semaines de recherches la gendarmerie a conclu que les ossements provenaient bien de l’ancien cimetière. Les scellés ont été retirés et Mme CAUQUIL a pu continuer les travaux de création de son cabinet de soins infirmiers.

Le futur cabinet de soins infirmiers en avril 2022

Où se trouvait l’ancien cimetière ?

En 1651, les inhumations se faisaient à Nexon dans deux cimetières à la fois. Le plus ancien entourait en partie l’église et forme aujourd’hui la place qui s’étend jusqu’au portail du château. Le second, plus récent, occupait l’emplacement de l’ancien Champ de Foire, aujourd’hui place de la République, et fut utilisé jusqu’à la fin de 1817.

Le cimetière qui autours de l’église fut abandonné vers 1680 et il n’y eu alors qu’un seul cimetière, plus grand que le premier. Son emplacement était bizarrement choisi, sur un sol rocheux en forte déclivité ce qui facilitait le ravinement des eaux pluviales. Il fut assez vite entouré d’habitations si bien qu’à la fin du XVIIIe siècle il se trouvait à peu près au centre du bourg. Les registres municipaux de cette époque relatent à plusieurs reprises les inconvénients résultant de la présence de ce lieu de sépulture sur ce terrain et en cet endroit.

Ils signalent que les tombes se trouvaient presque à fleur de terre et que les chiens et les pourceaux y déterraient parfois les cadavres, « quelques précautions que l’on ait prises ». Il était cependant clôturé « de murs d’une hauteur suffisante » et deux portes y donnaient accès, l’une dite « supérieure » et l’autre « inférieure ». De gros noyers l’ombrageaient de leurs rameaux. A l’intérieur se trouvait une Chapelle dédiée à Saint Léonard dont l’existence nous est révélée par un acte de 1652 : « le troisième d’avril mil six cent cinquante deux est decede en la Communion de nostre mère la Ste Esglise Jacques marginier âge de cinquante ans et fust ensevely dans nostre Cymetiére proche la Chapelle de St-Léonard confefsé et communié par moi soubsigné. F. Tarade pbre vicaire a Nexon ».

La question de son transfert a été posée en 1807, sous le Premier Empire. Le 20 octobre 1807, lors d’une séance extraordinaire, le Conseil fut saisi de plusieurs plaintes de particuliers et examina la question du déplacement du cimetière. Il délibéra sur les questions suivantes :

1°Acceptation de la proposition faite par Gabriel THOMAS, adjoint, de fournir un local en ce quoi on lui laisse une petite portion de cimetière à côté de son jardin ?

2°Laissera-t-on pour une place de foirail l’emplacement de l’ancien cimetière, déduction faite de l’échange THOMAS ?

3°Quel est l’emplacement le moins coûteux et en même temps le plus commode pour un nouveau cimetière afin d’atteindre le but proposé ?

4°Le terrain proposé par TARRADE remplit il le vœu de la 3éme question ?

5°Quels sont les moyens à prendre pour trouver les fonds nécessaires aux fins de la clôture du nouveau cimetière ?

Les premières, secondes et quatrièmes questions ont été adoptées à l’unanimité. Quant à la proposition TARRADE, après une longue discussion, l’échange est accepté avec une délimitation très précise. Quant à la 5éme question (financement) le Conseil décide de vendre les noyers se trouvant dans le cimetière actuel et dans le jardin de la cure et, pour le surplus, imposer tous les contribuables au marc le franc. Le surplus de l’ancien cimetière serait transformé en foirail.

Le 15 décembre 1807, le Conseil délibère à nouveau sur le changement du cimetière et fait connaître à Monsieur le Préfet : 1° que l’ancien cimetière se trouvant placé presque au milieu du bourg entouré d’ailleurs des maisons d’habitation pourrait dans les chaleurs excessives corrompre l’air et occasionner une épidémie ? 2° qu’il est incommode pour les habitants du bourg en ce que l’espace qu’il renferme gène  considérablement leur sortie ce qui fait qu’on a vu de temps en temps quelques cadavres exhumés par des cochons, quelques précautions qu’on ait pu prendre; 3° que les particuliers les plus près ayant senti pendant l’été quelques odeurs infectes, on a entendu de temps en temps des plaintes; 4° que sa position est nettement contraire à la loi; 5° que le nouveau local choisi par la commune doit ne présenter aucun des inconvénients, ne peut en aucune façon nuire à la salubrité de l’air, étant placé à 112 mètres de la maison la plus près ; 6° qu’à la vérité ce nouveau local présenterait une distance un peu plus longue pour certains villages, mais que cet inconvénient, si cela en est un, ne saurait être mis en parallèle avec les dangers qui pourraient résulter de l’insalubrité de l’air si le changement réclamé par le Conseil n’avait pas lieu.

Le terrain proposé par TARRADE était éloigné du bourg mais il fallu plusieurs années de discussions avant que le projet avance.

Le 27 mai 1812 le Maire désigne le sieur Antoine GUYOT du village du Brouillet, expert de la commune pour procéder à la délimitation de nouveau cimetière, à l’estimation du terrain et au coût du mur de clôture. Il nomme les sieurs François LIMOUSIN et François TARRADE officier de santé pour voir si la parcelle acquise peut bien servir de cimetière et s’il se trouve bien à la distance requise et ne cause aucun inconvénient aux voisins.

Enfin le 10 janvier 1813 le Conseil Municipal valide toutes les opérations relatives au nouveau cimetière et décide son aménagement. Il en demande l’autorisation au gouvernement.

Par un décret du 11 novembre 1813, Napoléon autorise le maire de Nexon à échanger avec le sieur TARRADE le cimetière actuel d’une superficie de cinq ares soixante centiares estimé à trois cent francs contre un terrain de cinquante ares et cinquante centiares estimé à quatre cent francs. Le décret autorise la commune à augmenter les impôts pour couvrir les frais et elle ne pourra commencer les travaux que lorsque le devis sera approuvé par le ministre de l’Intérieur.

Afin de réaliser le transfert dans les meilleurs délais, la commune a fait réaliser un devis par Laurent GUILLAT, maitre maçon à Bosmarèche, commune de Nexon. Le montant s’élève à 1 222 francs. La délibération du Conseil de Fabrique et du maire a été enregistrée à la mairie le 8 novembre 1814 et approuvée par le préfet de la Haute-Vienne le 13 janvier 1815.

Dans cette délibération le conseil constate que le devis estimatif et descriptif de la clôture du nouveau cimetière coûtera 1 222 francs mais que la vente des noyers de l’ancien cimetière n’a produit qu’une somme de 480 francs. Il demande à l’Empereur de prendre en charge la différence, la commune étant déjà trop imposée.

Le 15 Mai 1818 le Conseil décide la restitution des pierres de taille provenant de l’ancien cimetière, pierres que diverses personnes se sont appropriées. Il autorise GIZARDIN à faire toutes poursuites contre les délinquants.

Sur le plan cadastral de 1823 la rue Victor Hugo n’existe pas encore, je l’ai tracée au Stabilo orange. La parcelle n° 11est notée « du cimetière » et est une terre, la n°12 est notée place « aux habitants propriétaires de la commune » ainsi que la n° 13 qui est « la cure » et la n° 14 qui est la petite chapelle qui se trouvait en haut du cimetière.

La croix verte marque marque l’emplacement du cabinet infirmierCadastre napoléonien 1817 – ADHV
Tableau indicatif des propriétaires, des propriétés foncières … Cadastre napoléonien 1823 – ADHH

Ainsi il arrive que le passé se rappelle à nous.. C’est une belle occasion pour le faire revivre.

En 1897 une jeune fille est relaxée après avoir défiguré au vitriol le garçon qui lui a fait un enfant et ne l’a pas épousée…

Le 14 septembre 1996 la presse limougeaude rendait compte de ce fait divers :

Le Courrier du Centre 14 septembre 1896

Le procès qui va se dérouler quelques mois après va révéler toute la complexité de cette affaire. Le garçon et la jeune Catherine étaient amoureux mais le père de la jeune fille trouvait que le garçon n’était pas un bon parti. Il a interdit à sa fille de le revoir… et bien sur celui-ci a rencontré quelqu’un d’autre ce que la jeune fille n’a pas supporté, d’où sa vengeance.

Dans un premier temps elle a été mise en prison et son enfant est né pendant son incarcération.

La Charente 17 octobre 1896

Le procès à lieu le 16 février 1897 devant la Cour d’Assise de Limoges. La salle est comble et la tribune des dames est complète.

Le Courrier du Centre 16 février 1897

La presse a donné une large place à ce procès. Voici le compte rendu publié dans le Courrier du centre du 17 février 1897 :

COUR D’ASSISES DE LA HAUTE—VIENNE

Audience du 15 février 1897

Affaire Catherine Pradaud (Coups et blessures)

Catherine Pradaud. 21 ans, est originaire de Nexon, où elle est née le 6 octobre 1873 ; elle est cultivatrice a Sazerat. C’est une jeune femme aux traits réguliers, vêtue de noir. Un fichu de même couleur lui couvre la tête.

Elle tient entre ses bras un mignon bébé de quatre mois, joufflu et bien portant, une petite fille qui ne demande qu’à vivre et regarde de ses grands yeux étonnés cette foule qui se presse dans l’auditoire.

M. Debay, greffier, donne lecture de l’acte d’accusation, et, pendant cette lecture, l’enfant, dont l’heure du goûter est arrivée, saisit avidement l’extrémité d’un biberon que lui tend sa mère et tète.

Acte d’accusation

Le 11 septembre 1896, vers midi, la fille Catherine Pradeau se rendit dans un champ où travaillait le sieur Jean Denardou et lui lança par surprise le contenu d’une fiole d’acide nitrique. Gravement atteint au visage, à la poitrine et à l’œil droit, Denardou, malgré des soins immédiats et un long traitement, a complètement perdu l’usage de l’œil.

La victime de cet attentat avait entretenu, pendant longtemps, des relations intimes avec Catherine Pradeau.

Mais le père de la jeune fille, ne voulant pas la donner en mariage à un jeune homme sans fortune, avait fait interdire a Denardou l’entrée de sa maison.

Apprenant que, malgré sa défense, les deux amants continuaient à se voir, il avait proféré des menaces de mort contre le jeune homme, disant qu’il le tuerait, s’il le surprenait avec sa fille. L’état de grosses de cette dernière n’aurait pu modifier de si hostiles dispositions et, au mois d’août, le sieur Pradeau déclarait encore qu’il ne consentirait jamais à accepter Denardou pour gendre.

Celui-ci cependant, désespérant de le faire revenir sur sa détermination, avait cessé depuis quelque temps de fréquenter Catherine Pradeau lorsqu’il fit, à Aixe, le 15 août 1896, la connaissance d’une jeune fille qui lui plut et qu’il fit demander en mariage. Sa demande avant été favorablement accueillie, le mariage fut fixé au 19 septembre et les publications furent faites à Nexon.

Catherine Pradeau, à la nouvelle de cette union, qui ruinait ses dernières espérances, se rendit auprès de Denardou, le 8 septembre et le supplia de revenir à elle, lui disant qu’il n’avait plus à craindre le refus de ses parents. Mais le jeune homme lui répondit que son mariage avec Maria Denis était trop avancé, à l’heure actuelle, et qu’il ne pouvait le rompre.

Malgré ce refus, le sieur Pradeau fit faire le lendemain par l’entremise du voisin, une démarche auprès de Denardou dans le but de le décider à épouser sa fille.

C’est à la suite de l’insuccès de cette dernière tentative que Catherine Pradeau se porta, le 11 septembre, à la rencontre de son amant et lui jeta au visage le liquide corrosif que, dès le 8 septembre, elle avait acheté chez un pharmacien de Nexon, dans un but de vengeance.

En conséquence, la fille Catherine Pradeau est accusée d’avoir, au mois de septembre 1896, en la commune de Nexon, volontairement fait des blessures au nommé Jean Denardou, avec, ces circonstances :

1° Que lesdites blessures ont été suivies de la perte d’un œil ;

2°Que ladite Catherine Pradeau avait, avant l’action, formé le dessein d’attenter à la personne dudit Jean Denardou.

L’interrogatoire

M. le président procède à l’interrogatoire de l’accusée.

Celle-ci se lève et, pour apaiser son enfant qui commence â s’impatienter, elle le berce doucement ; vainement, car les cris continuent ; il faut que Camille, le garde du palais, le prenne dans ses bras et l’emporte chez lui avec son biberon.

L’interrogatoire commence ; elle répond d’une voix faible aux questions préliminaires qui lui sont posée. Elle avoue avoir jeté à la figure de son amant un bol d’acide azotique et avoir causé la perte d’un œil.

— Et pourquoi avez-vous commis cette action lui demande le président.

C’est un garçon que j’aimais beaucoup et que J’aime encore, répond l’accusée, il m’avait promis le mariage et m’avait juré de ne m’abandonner qu’a la mort. Il venait chez moi, à la veillée, c’était un camarade de mon frère. Après la départ de mon frère pour le service, Denardou n’est pas revenu, mon père le lui avait défendu. Nos rapports ont duré trois ans, ils ont cessé trois mois après que je me suis reconnue enceinte.

D. Denardou est-il le père de votre enfant ?

R. Monsieur le président, il en est le père comme j’en suis la mère.

D. Ce n’est pas ce que dit votre victime. Vous a-t-il demandée à votre père ?

R. Non, monsieur, mais la première fois que j’eus des rapports avec Denardou, c’est après une promesse formelle de sa part de me prendre pour femme.

D. Voire père ne voulait pas de ce mariage, il ne vous l’avait pas caché.

R. C’est vrai, mais j’aimais Denardou et lui m’avait promis de ne me quitter qu’a la mort.

D. A quelle époque vos parents se sont-ils aperçus de votre état de grossesse ?

R. Six ou sept mois après.

D. A ce moment, dites-vous ils ont déclaré ne plus voir d’obstacles à votre mariage avec Denardou. Eh bien ! il parait qu’il n’en est rien. A quelle époque avez-vous appris le projet de mariage entre Denardou et Mlle D.… ?

R. Vers le mois de septembre, alors je suis allé trouver mou amant et lui ai demandé si la nouvelle que je lui répétai était exacte. Il m’a répondu affirmativement, et a déclaré qu’il ne pouvait pas m’épouser puisque mes parents ne le voulaient pas. Je lui ai répondu que c’était faux.

D. Et c’est le 8 que vous avez acheté de l’eau forte chez M. Bonnel, pharmacien à Nexon, sous prétexte que vous en aviez besoin pour faire disparaître des verrues.

R. C’est exact.

D. Était-ce bien pour en faire l’usage que vous disiez ?

R. Non, monsieur. J’étais affolée et je voulais me venger.

D. Le 11 septembre, vous avez eu un second entretien avec Denardou ?

R. Oui, je suis allée le trouver et une fois de plus Je lui ai demandé s’il voulait m’épouser ; il m’a répondu non ; alors je lui ai jeté un bol d’acide à la figure.

L’audience est suspendue à 11 heures1/4.

Audience du soir

L’audience est reprise à une heure un quart. La salle est comble, la tribune des dames est au grand complet.

L’accusée est introduite et s’assoit à son banc ; elle tient toujours entre ses bras son enfant qui dort doucement sur le sein de sa mère.

Les Témoins

L’audition des témoins commença.

— Denardou, la victime de cette affaire passionnelle, raconte la scène au cours de laquelle il reçut au visage le liquide corrosif.

Il prétend que s’il n’a pas voulu se marier avec la fille Pradaud, c’est, qu’on lui avait dit que le père de celle-ci voulait le tuer s’il devenait son gendre.

Le président lui demande s’il est certain d’avoir été le seul à entretenir des relations avec Catherine Pradaud.

Le témoin dit qu’elle se rencontrait souvent avec plusieurs d’e ses amis et qu’il était bien possible qu’elle se fût donnée à d’autres que lui.

A une question catégorique du président sur ce point, Denardou répond « qu’il croit qu’il pourrait bien y en avoir eu d’autres, mais qu’il ne peut l’affirmer ».

Sur la demande du défenseur, Denardou reconnaît implicitement qu’il avait entamé des démarches en vue d’un mariage avec une autre jeune fille avant de savoir quelle était l’attitude des parents de Catherine Pradaud à son égard.

Il reconnaît également avoir objecté à la malheureuse jeune fille qui le suppliait de l’épouser, « qu’il était décidément trop tard, que les habits de sa noce avec Mlle D.… étaient achetés et qu’enfin il n’y avait plus rien à faire ».

Cet aveu cynique soulève un murmure dans l’auditoire.

— François Pradaud, 30 ans, cultivateur à Nexon, avait eu des idées matrimoniales sur la fille Catherine Pradaud, mais ayant appris que cette dernière était enceinte, il changea d’avis.

— M. Firmin-Barthélemy Tarrade, 65 ans, propriétaire à La Plaine, reçût la visite de la mère de l’accusée, trois ou quatre jours avant l’affaire qui amène Catherine Pradaud devant les assises.

Le témoin se chargea de faire une démarche auprès, de Denardou. Cette démarche n’aboutit pas et M. Tarrade le fit savoir au père de la jeune fille. Cet homme se mit alors à pleurer pendant une demi-heure, ajouta le témoin.

— Mme Bonnel, femme de M. Bonnel, pharmacien à Nexon, a délivré sur sa demande à l’accusée, du l’acide nitrique pour brûler des verrues.

— Jean Pradaud, 27 ans, employé de commerce, a assisté un jour à un entretien qu’avait à l’auberge le père de l’accusée avec une autre personne. Il était question de Denardou. « Il ne se mariera pas avec ma fille, dit le père Pradaud, je les tuerai plutôt tous les deux ». Ceci se passait le 1er août.

— M. le docteur Escorne a examiné Denardou aussitôt après le jet d’acide azotique dont il a été victime. L’honorable témoin explique d’une façon très précise les constatations qu’il a faites et termine en déclarant que l’œil droit de Denardou est complètement perdu, sans espoir de guérison.

— M. Gabriel Thomas, maire de Nexon, donne d’excellents renseignements sur la famille Pradaud, et en particulier sur l’accusée, fille très honnête et très sage. I

De son côté, Denardou est un excellent garçon qui n’avait jusqu’alors jamais fait parler de lui.

Le témoin a vu Catherine Pradaud à la gendarmerie après son arrestation, elle a regretté son acte de désespoir et a ajouté : j’aime toujours Denardou, et fut-il aveugle, s’il me voulait encore, je suis prête à l’épouser.

On est ému dans l’auditoire.

Le Réquisitoire et la Plaidoirie

M. Barnardbeig, substitut de l’avocat général, prononce un réquisitoire où perce une certaine émotion sympathique en faveur de l’accusée.

Néanmoins, se basant sur le principe qu’on ne doit pas se faire justice soi-même, l’honorable organe du ministère public conclut à l’application d’une peine mitigée par l’admission de Iarges circonstances atténuantes.

Le rôle de M. Nicard des Rieux est singulièrement facilité ; autant on est touché de la situation pénible dans laquelle se trouve sa cliente, autant Denardou est indifférent a tous.

Et avec son éloquence habituelle, le sympathique avocat rappelle tout ce qui a précédé la scène du 11 septembre, il montre le désespoir de la Jeune fille enceinte et l’égoïsme du séducteur.

Il insiste sur son cynisme lorsqu’il lui objecta qu’il ne pouvait l’épouser, ses habits de noces étant acheté pour une autre.

Me Nicard termine en demandant un acquittement.

Le jury se retire pour délibérer et rapporte le verdict que tout le monde attendait, un verdict négatif, un verdict d’acquittement.

Et dans la salle on applaudit lorsque lecture en est donnée à l’accusée.

L’audience est levée à 4 heures 1/2, une foule sympathique s’était massée au pied des escaliers du palais de justice pour voir sortir Catherine Pradaud que l’on a accompagnée jusqu’à la prison où a eu lieu la levée d’écrou.

Le Courrier du Centre 1897/02/17

Que déciderait un jury aujourd’hui ? Le respect de la parole donnée est la base de la société et c’est un déshonneur pour un garçon de ne pas épouser la fille qu’il a mise enceinte. Et pourtant, à Nexon comme dans toutes les communes, les enfants naturels n’étaient pas rares.

Sépultures et cimetières hier et aujourd’hui : II- les sépultures en propriété privée

L’inhumation dans une propriété privée est exceptionnelle mais elle est possible. Elle est autorisée par le préfet du département où est située cette propriété sur attestation que les formalités prescrites par l’article R. 2213-17 du Code Général des Collectivités territoriales (constat du décès par l’officier d’état civil) et aux articles 78 et suivants du code civil (relatifs à l’acte de décès) ont été accomplies et après avis d’un hydrogéologue agréé. Il faut que la propriété soit hors de l’enceinte des villes et des bourgs et à la distance d’au moins 35 mètres.

Sauf modification notable du site et de ses environs, si plusieurs inhumations ont lieu sur le même terrain privé, l’administration considère qu’il n’est point besoin de solliciter un avis pour chacune d’elles, le premier avis étant suffisant.

A Nexon les seules inhumations sur terrain privé au cours des dernières décennies ont été effectuées dans la Chapelle de la famille de Nexon située dans le parc du château.

La chapelle dans le parc du château sous le soleil de juillet  

La Chapelle avant sa rénovation

CHAPELLE DU PARC DU CHÂTEAU DE NEXON

SÉPULTURE DE LA FAMILLE DE GAY DE NEXON

 

– Baronne Jean-Baptiste de GAY de NEXON, née Anne de VEYRINAS (1736 – 1806)

– Baron Jean Baptiste Ferréol de GAY de NEXON Dit Monsieur de Campagne (1761 – 1844)

– Baron François Alexis de GAY de NEXON Chevalier de Saint Louis (1769-1837)

– Général Marquis Félix de NARP, Maréchal de camp près l’armée Belge (1786- 1844)

– Abbé Luc de GAY de NEXON, Grand Vicaire d`Oloron (1754 – 1846)

– Marie Clotilde de GAY de NEXON (1849- 1849)

– Comte Maurice de NARP (1824 – 1851)

– Marquise Félix de NARP, Née Alix Zoé de ROUVROY (1796 1851)

– Baronne François Alexis de GAY de NEXON, née Amable de BERMONDET de CROMIERES (1780-1858)

– Baron Astolphe Hippolyte de GAY de NEXON (1817 – 1876)

– Baronne Astolphe de GAY de NEXON, née Alix Clothilde de NARP (1828 – 1881)

– Baron Félix de GAY de NEXON (1850 – 1909)

– Baron Armand de GAY de NEXON (1847 – 1912)

– Baron Auguste de GAY de NEXON (1853- 1932)

– Baronne Armand de GAY de NEXON, née Marie-Antoinette de MONTBRON (1873- 1933)

– Baronne Auguste de GAY de NEXON, née Gertrude RICARDO (1863 – 1941)

– Baronne Maurice de GAY de NEXON, née Adrienne CHANEL (1882 – 1956)

– Mademoiselle Thérèse de GAY de NEXON (1890 – 1961)

– Baron Maurice de GAY de NEXON (1884 – 1967)

– Baron Robert de GAY de NEXON (1892 – 1967)

– Baron Georges de GAY de NEXON (1900 – 1973)

– Baronne Georges de GAY de NEXON, née Anne Renée CESBRON-LAVAU (1902 – 2005)

– Madame Lieselotte DIELS, née DRABA (1919 – 2013)

 

Sépultures et cimetières hier et aujourd’hui : I- les sépultures dans l’église

On trouve dans les anciens registres de la paroisse des actes faisant mention de sépultures dans les chapelles de l’église de Nexon. Par exemple celui-ci de 1652 indique une inhumation devant la Chapelle Ste-Catherine : « Le troiziesme jour du mois d’avril mil six cent cinquante deux est décédée en la Communion de nostre mère la Ste-Eglise Anne Moureau veufve Mr Jean de Verneilh notre royal du bourg âgée de quatre vingt ans estant par moy Confessée et Communiée dont le Corps repose en ladtte esglize devant lautel de Ste-Catherine dont nous avons Commandé une grande messe de Mort a diacre et Sous diacre. F. Tarade prbtre vicaire de Nexon ». Plus tard, en 1672 c’est devant la chapelle de Notre Dame que la personne est enterrée : « Le 17e Xbre 1672 le sieur des places mourut âgé de 28 ans et fut ensevelit dans lesglise de Nexon q/ tombeaux de ses feux prédécesseurs devant l’autel de nostre dame pnt Mr Clément et Mr Laurans prêtre de Nexon fait par moy vicaire de Nexon. Guyot vicaire dudt Nexon ».

Une page du registre pour montrer la difficulté de lecture …

Comme dans tout le Limousin, les notables avaient à l’église leur banc de famille, et sous ce banc était creusé leur caveau funéraire. Les registres paroissiaux ne relatent pas systématiquement ce détail mais on trouve des références à des inhumations devant le banc de la famille de Nexon, par exemple : « Le dix huitième jour du mois de Juin mil sept cent soixante sept est décédé au Château de Nexon et a été inhumé devant le Ban de la Sélive, Monsieur Claude DEGAY fils de messire Jean-Baptiste Féréol Degay Ecuyer signeur de Nexon. Et de Darne Anne Hebrard âgé d’environ neuf ans, ont assisté à son enterrement Mefsire françois Alexis Degay Ecuyer Cher de l’ordre royal militaire de St-Louis et Me Jean Baptiste Deverneilh notre royal qui ont soussigné avec Moy. Denexou – Deverneilh – Cosnac curé de Nexon ». La famille de Nexon a gardé son banc dans l’église jusqu’à la fin des années 1960, date à laquelle l’abbé Redor, curé de la paroisse, le fit enlever, les mauvaises langues disant que c’était pour se chauffer car le presbytère était froid et humide et ses revenus très faibles !

Un acte de 1760 nous apprend que les membres de la Fabrique avaient dans l’église un caveau spécial  «  Le vingt troisiesme jour du mois de juin mil sept cent soixante est décédé au bourg après avoir reçu les sacrements de l’église et est inhumé dans le tombeau de la fabrique, St Annet Tarrade âgé de soixante huit ans ou environ, Juge de Nexon, ont assisté à l’enterrement Jean Bte Deverneilh procureur d’office et François Guyot Controlleur des actes qui ont signé Deverneilh proc ; d’office – Guyot Controlleur„ « Cosnac curé de Nexon »

L’existence de plusieurs tombeaux dans les différentes chapelles de l’église montre que l’église de Nexon est une vaste nécropole. On y relève plus de cinq cents inhumations faites entre 1650 et 1778.

Les pierres tombales se voient encore très nombreuses dans les différentes parties de l’église mais la plupart ont été retaillées, divisées ou changées de sens, lorsque le pavé, fortement détérioré pendant la période révolutionnaire fut réparé de fond en comble en 1802 ou 1803, au moment du rétablissement du culte.

A côté des familles nobles et des prêtres qui avaient, d’une façon bien établie et admise par tous, un droit de sépulture dans l’église, beaucoup d’autres, bourgeois, artisans, gens aisés des villages … prétendaient jouir de cette même faculté sans y avoir droit. Dès le règne de Henri IV, ces prétentions non justifiées étaient la cause de procès dans la France entière. Aussi les curés, et ceux de Nexon en particulier, s’entourent de précautions minutieuses afin que leurs paroissiens ne puissent se prévaloir de l’inhumation d’un des leurs dans l’église pour en conclure à un droit dans l’avenir. Dans ce cas, qui devint le plus fréquent au XVIIIe siècle, l’enterrement était dit « sans conséquence », et les actes mortuaires étaient rédigés de façon à éviter toute réclamation ou prétention ultérieure.

En voici quelques exemples choisis parmi les plus caractéristiques :

1689 – Décembre. « Le vingtiesme jour du mois et an susdict a été inhumée dans Leglise de Nexon Gabrielle Bonnet veufve de feu léonard de Combrouse décédée dans le pnt bourg le jour d’hier âgée d’environ cinquante ans sans que pour raison de ce qu’elle a été enterrée dans Lad. Eglise Jean de Combrouse son fils, ni les siens puissent prétendre aucun droit de sépulture dans Lad, église auquel Led de Combrouse a déclaré renoncer sans quoi Led enterrement n’aurait été fait dans Lad. Eglise et le dit de Combrouse a signé avec moy. Juge curé de Nexon – J de Combrouse »

1694 – Novembre. « Le trenième du mène mois et an que dessus a été inhumée dans Leglise de Nexon Françoise DECOUILHAC fille de Pierre DECOUILHAC et de Peyronne Puidenus sa femme du village de Mazérieux décédée le jour précédent, âgée d’environ trois mois, Led. Enterremt a été fait dans Leglise sans tirer à conséquence moyennant quarante sols que le père a donné pour les réparations. Juge Curé de Nexon ».

1695 – Novembre. « Le vingt et troisième du même mois et an que dsssus jay ensevely dans leglise de Nexon Jean DEVERNEILH mort le jour précédent âgé de huit jours. C’est pourtant sans conséquence et sans qu’ils puissent prétendre de se faire ensevelyr dans la ditte église sans le consentement de Monsieur le Curé. Bouthet vicaire de Nexon ».

1714 – « Le deuxième jour du mois d’avril 1714 a esté inhumé dans l’église de Nexon sans tirer à conséquence et pour don fait à l’églize Marie DEGAY femme de Pierre DUPUITREN auprésent bourg ».

1714 – Novembre. « Le 17e dud mois et an a esté inhumé Me Thomas Berny sieur de Noyéras – Juge de Nexon dans l’église de nexon sans tirer à conséquence et pour don fait à l’église pour paver lad, église décédé dans le présent bourg, âgé d’envrion 80 ans ».

1725 – « Le premier Novembre mille sept cent vingt cinq Pierre GIZARDIN apothicaire âgé d’environ cinquante ans a été enterré dans l’église en payant les droits accoutumés en présence de sa famille ».

Il est difficile de dire à combien se montaient ces droits accoutumés. Il est souvent question de donner quarante sols, cent sols, dix livres mais il s’agissait là, plutôt d’une donation spéciale que d’un tarif déterminé. Quelquefois aussi l’enterrement dans l’église était un honneur décerné à ceux qui avaient rendu à la paroisse des services signalés. Ainsi en 1742, François TARRADE du bourg, est enterré dans l’église pour avoir été « Caille des âmes » pendant trente ans. Il s’agit d’une sorte de confrérie qui avait pour fonction de recueillir les offrandes pour les âmes des défunts ; il en existait également une à Limoges dans la paroisse de St-Michel. Bien que les confréries fussent nombreuses avant la Révolution, celle-ci est la seule que mentionnent les registres paroissiaux de Nexon

En 1776, les inhumations furent interdites dans les édifices religieux. A Nexon, cette interdiction ne fut observée que deux ans plus tard à la fin de 1778, le dernier enterrement fait dans l’église étant celui d’un domestique du Château des Pousses, le 23 Octobre 1778. Après cette date toutes les inhumations furent faites dans le cimetière.